Comme un spasme.
Cela aurait pu être la terre, l’eau et le fourrage. Cela aurait pu prendre forme, ajourer l’ombre des montagnes, et ruisseler comme une lumière dévale les pentes. Mais, ce n’est qu’un songe, qu’une bande défilant sous les yeux. Nos cœurs sont sur la table. Le repas est fini. Il faut ranger les assiettes et les couverts, puis l’évier encombré. On raccroche nos serviettes. C’est terminé.
Cela aurait pu être un repas sans terme, un verre toujours rempli, un moment ventru berçant une soirée et tous les soirs qui suivent. Cela aurait pu tricoter le silence d’une bouche pleine, d’un ventre qui reçoit. Un moment de remplissage et du temps qui se ronge et de la faim qui revient comme un vœu s’assoie sur la chaise d’à côté.
Mais, tu n’es plus là. Ta place est vide. Ton assiette aussi. Et mon cœur n’a plus faim.
Je sais bien que tout s’efface, que tout se gomme à l’éternité. Je sais, aussi, la rognure des traces, l’ourlet rebèche sur la serviette et les plis arides restés sur les mots qui renaissent de leur chute.
La mélancolie migre comme l’hirondelle. Elle ne connaît pas demain, elle n’a pas de boussole. Ma vie sertie au vide des joies, aux bonheurs crispés de leurs étincelles, et puis toi habillée d’eau sur un rayon de lune.