Ta peau est aussi claire que l’eau de la fontaine.
Où que tu sois, je sais que tu te souviens de moi. Parce qu’au fond du silence brille le langage des ondes persistantes et le souffle de l’humanité. Perdurant dans la chute, un jour, l’absence s’érodera. Elle deviendra l’empreinte du cœur dans la saillie exaltée du vide. Un matin endigué par des figures en ruines, nous marcherons ensemble sur le tapis des ténèbres, et l’on sautera à pieds joints dans une tache d’encre, dans un grumeau de paroles inédites. Alors, on embrassera les premiers rayons du soleil coiffant les branches de pins où nous sommes restés suspendus. On soulèvera les draps, on avalera un café, et l’on repartira dans la tiédeur de la nuit avec une sirène sur l’épaule. Quelque part, l’absence aura musclé la respiration du vide et nos souffles connaîtront le partage avec l’infini. A présent, ils dévissent l’air qui a déjà servi.
La permanence sommeille dans la couleur des cœurs malgré le noir de l’abysse. L’éternité n’existe que pour cela. Elle est cette brochure d’ivoire marbrée qui reste cachée sous le sable contenant toute l’attraction du monde. Mourir et renaître, penser et dire, rêveret vivre. Il n’y a pas de terminaison, juste un bout de ficelle accroché au pin parasol tordu par la tempête. Il n’y a pas de limite, tout n’est qu’un espace sans frontière. Toute l’existence est un simple fil de lumière enroulé comme une guirlande à la patère d’un univers fougueux où l’espace est un leurre.
Pourtant, un bouchon de liège flotte dans le ciel et nos yeux se sont fermés sur l’immensité. Regarde ! Des libellules jouent à la pétanque. L’air pur a quitté la montagne. Nous butinons les fleurs séchées qui sont restées dans nos mains. Ta peau est aussi claire que l’eau de la fontaine. Nos cils goûtent aux frissons des baisers de papillons. Des arpèges caressent la brume, et nous dormons à l’intérieur d’une faille exaltée. Nos yeux sont engloutis dans la chair et nos entrailles sont les stéthoscopes de nos plaines intérieures. Ils sont les miroirsd'une conscience ivre de solitude.
- Bruno Odile - Tous droits réservés ©