Je suis seul et tu n’y peux rien.
L’amour ne décourage pas le néant, la fêlure est étroite et le ciel immense. L’extension de l’espace dévore l’éclat figeant la fleur au centre du vide. La vacuité est plus légère que l’émotion, elle dissipe l’éternité et déborde le sentiment qui n’est qu’une ancre dans la tempête. La frontière entre l’espoir et la réalisation de nos vœux demeure cette fine pellicule où se retiennent nos vertiges et nos vomissements de tendresse.
Qui n’est pas coupable de mourir trop top ? Vivants, nous savons bien que rester debout est un équilibre précaire, que la chute est une ombre dans l’attente d’un faux pas. Le courage est alors une plainte informulée, un cœur à la dérive maintenant son cap malgré l’orage qui s’abat sur nos voilures.
« Je t’aimerai toujours » est l’aveu des cimes éventrées par lesquelles le temps s’appauvrit de sa durée. L’amour est le synonyme de l’instant qui frôle l'immortalité.
Je porte toujours ton cœur entre mes bras. Tu es partie avec l’eau des rivières originelles et moi je reste là, sur la colline, comme une flaque de pluie qui a connu la brisure du ciel. Demain, vois-tu, nos ombres détachées de la nuit parleront à notre place. Elles s’écrouleront à la percée du jour et nous brûleront comme des étoiles lointaines. Nous devenons une clarté à l’écart. Nous ne sommes plus qu’une tache de lumière perdue dans l’immensité étrangère. Nos yeux et nos lèvres s’évanouissent dans la durée qui n’en est plus. Je devine ton fantôme que la foudre a frappé. Je suis seul et tu n’y peux rien. Je suis amoureux et tu danses dans mes rêves comme un tourbillon multicolore.
L’amour et la liberté se ressemblent dans la muselière qui exige d’eux la plus grande sincérité. Pour autant, il ne nous est impossible de déroger aux caprices de nos nécessités. Passagers de l’histoire, nous nous révélons par les liens que nous tissons et dans le partage avec la vie qui nous entoure. Seul miroir de notre affermissement intime l’échange est notre unique salut.
- Bruno Odile - Tous droits réservés ©