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LA COLLINE AUX CIGALES
16 mai 2013

Nous sommes tamisés.

68449644La vague qui n’emporte pas restitue à l’océan les reflets du ciel. Les deux droites à la mer superposées s’éclipsent et se fondent l’une dans l’autre. L’horizon est un bouillon grumeleux devenu la charnière des temps liquides. C’est le vent qui retient nos visages. Nos faces sont détachées de nous-mêmes, elles remontent vers la blancheur têtue qui s’habille de la nuit. Les lèvres lapant la parole desserrée, la langue dans le brouillis d’époques lointaines revient comme un boomerang pour occuper nos crânes blanchis et lisses. Nous détrempons dans l’onomatopée fluctuante : 

Gzeux, aie, ouille, spling. Tout ce que nous avons bu et recraché, Gzeux, aie, ouille, spling, a rejoint l’eau.

Gzeux, aie, ouille, spling. L’eau sans âge, Gzeux, aie, ouille, spling, l’eau toujours nouvelle et identique à l’eau. 

Tout est inscrit dans la goutte. Mémoire génétique du futur installé là, ad vitam aeternam. On se déshabitue à vivre après chaque respiration. L’air nous transporte et nous passons. L’air nous transforme et nous voyageons. Nous sommes volatiles et nos suées se dissipent dans l’infiniment grand. 

La porte de l’air s’ouvre et se ferme. Nous sommes tamisés. C’est le filtre du vide qui choisit le néant grain après grain.

La distance s’effrite, j’ai coupé la corde. La ligne d’images calleuses s’est évanouie. L’air s’en est réjoui.  

La colline cherche ton corps. Son volume est troué par le manque devenu gaz en volutes. L’herbe inoccupée s’avachit comme une horloge défectueuse et résonne lourdement sur le mur d’en face. Descendue du ciel, puis rapportée, la lumière gêne les arbres qui se prennent par la main pour danser les saisons. L’air est droit, il te remplace. 

Dans la vallée, le ciel s’écarte comme des lèvres sous l’effet de la surprise. Il laisse passer ta silhouette frêle et colorée. Un sourire glisse jusqu’aux berges du Rhône. L’eau te contemple. Elle mime tes grimaces. Elle file, lisse et ronde, comme un miroir flottant. Sans toi.

 

 

- Bruno Odile - Tous droits réservés ©

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  • Dépotoir et déposoir de mots, de pensées... Ici repose mon inspiration et mon imaginaire ; une sorte de maïeutique effrénée et dubitative et il me plait de pouvoir partager à qui veut bien.
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