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LA COLLINE AUX CIGALES
4 avril 2013

Tu verses de l’amour dans mes veines.

4e12e78aDans les vestiges d’une vie, l’apparente stagnation du monde. Rien ne semble bouger, pas même une brise. Me voilà donc gagné et vaincu par ta disparition. Je te conserve en mon domaine dans une forme de dissidence constante et laborieuse. Notre passé, irrémédiablement figé, est maintenant un socle providentiel où mon existence se poursuit. Je ne traite plus avec des images mortes mais avec un immédiat où tu m’accompagnes. Tu es ma partenaire privilégiée avec laquelle j’affronte l’inconnu qui me fait face comme un Everest attend les pieds novices d’un alpiniste plein d’espoir.  

Tu aurais préféré sans doute comme moi te jeter dans un lit d’orties plutôt que de veiller l’absence comme une lune surveille la nuit. Mais, il faut bien vivre ! 

C’est toujours la même pulsion froissée puis acheminée vers le feu, traînée à la pente comme un sac chargé d’émotions pures. J’en oublie le poids de l’air sans relâche repeint sous tes paupières. La nuit transforme tes yeux en deux étoiles qui tournent autour de Vénus, aimantées à la phosphorescence de mes rêves. Tes lèvres, locataires de l’insurrection des mots, s’engouffrent dans les failles ouvertes que les pores de la parole accueillent comme des soleils guerriers. Dans la rue, un rêve défunt gît sur l’asphalte et nous passons sans le voir. 

J’ai brûlé nos joies dans l’agonie du silence. J’ai étranglé ma culpabilité dans le creux profond de cette cicatrice qui se voit encore à la surface de mes yeux. Je me suis nourri des herbes qui poussent sur les murs, cloisonné et emmuré comme un pharaon d’amour couché à jamais dans une pouponnière de désirs. J’ai enterré dans mon corps tous tes sourires et toutes tes exubérances fiévreuses. J’attends toujours que ton visage s’efface avant de sentir le noir chavirer dans l’oubli. J’attends que la nudité de mes espérances se confie à l’intensité de ma soif. Chaque jour ancien se décompose au présent. Un limon noirâtre pèse sur l’air. Je connais ton sang qui s’use dans le mien. Tu verses de l’amour dans mes veines.  

Tu sommeilles dans la crue de l’air, dans l’abondance du vent.


Tu sais, les mots me travaillent autant qu’ils cognent à mon esprit. Dans le délitement des aubes, la voix du conteur s’élève comme un fatras de corps sans gravité. 

Cette soif abondante et incontrôlable à vouloir absolument savoir ce qui se serait déroulé si… Ce morbide conditionnel qui remet en cause les choix que nous n’avons pas tranchés : « Et si j’avais fait… » ; « Et si nous avions été… ».  Ils se sont tus là où ils auraient dû parler, et ils parlent là où ils devraient se taire. Alors comment te dire maintenant l’asphyxie qu’ils provoquent ?  

Tu sais bien que je veux te parler de la parole poétique, celle qui vient se nicher au cœur même de notre désolation à ne savoir exprimer avec exactitude la source qui l’a enfantée. Cette voix porte en elle le hurlement qui n’a pas trouvé d’issue, le cri des organes du dedans restés compressés sans jamais pouvoir se relâcher. Ces verbes émaciés et tassés dans une cocotte-minute bouillante que l’on n’entend pourtant jamais siffler. 

  

- Bruno Odile - Tous droits réservés ©

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