Délit de fuite.
J’arrive au bout du jour avec toi
Nous l’avions entamé ensemble
Au bout d’une autre nuit claire
Où nos mains jouaient
Avec les ombres chinoises
Cachées sous nos paupières
J’ai perdu la clé de la boite à mémoires
L’éternité s’est répandue
Comme une peinture noire
Sur la nacre de mes prunelles
Cela fait si longtemps que ça dure
Que ma vie se perd dans sa pantomime
Elle se reproduit sans cesse
Dans le rêve qui t’éclaire
J’aimerai fermer la fenêtre
Et rester un long moment
Prêt de la flamme d’une bougie
J’aimerai ne plus attendre
Que la plaie se referme
Que le vacarme soit un silence
Mais cela serait trop demander
La vie est trop la vie
Pour faire la morte
Sur le lit des espérances
Ne serait-ce qu’une seconde
Je n’aime pas fermer les yeux
Lorsque le soleil touche l’herbe
La paille et le temps qui les sépare
Je n’aime pas la discorde de l’air
Dans une bulle de savon
Le cri d’un corbeau dans la plaine
Où les labours ouvrent la terre
A de futures naissances
Je n’aime pas les heures ridées
Où l’on prie le temps de se réduire
Je suis un homme simple d’esprit
J’aime le thé au citron
Lorsque le fruit me ramène
A l’arbre et à la terre
Je crois que la mort s’enivre
Comme une vague
Connaît le vent qui la roule
Je crois à l’éther qui conserve
Dans sa pâleur invisible
Une part de vérité
Une part de contre-vérité
Je crois aux caprices du hasard
Faisant l’amour sous la tonnelle
En fleur de l’arrière boutique
Et puis j’aime le monde
Lorsqu’il copule dans sa gargantuesque frénésie
J’existe sans toi au-delà de l’horizon
Je suis l’enfant dans le ventre du temps
J’ai bouffé à tous les râteliers
Le foin de ta perte
Et maintenant je suis debout
Cœur à cœur avec ta disparition
Dans une nuit qui s’éclaire
Aux lampions de ton regard.