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LA COLLINE AUX CIGALES
7 février 2013

Il est des moments où l’heure s’échappe.

camille_hilaire

Rappelle-toi, nous jouions à cache-cache dans les champs de blés. Nous comptions, les yeux fermés, le temps qui creuse les visages, et nos joues buvaient les moments complices comme on trinque à l’amitié, à la joie de vivre. Et, nous nous devinions d’un bruit, d’un frémissement d’épis, dans le clignotement de nos présences camouflées ; tantôt là, tantôt cachées. Nos clignes musettes révélaient l’appétit que nous avions à nous chercher, à nous retrouver, quand bien même nous nous découvrions différents de ce que nous étions. C’était nous, c’était bon ! C’était intercepter nos corps aériens comme des hirondelles fonçant sur les coquelicots gorgés de rouges désirs. 

Je me souviens combien tu contemplais ce miroir d’orbes intimes où le hasard recouvrait notre destin d’extravagances. Notre infortune plus que toutes les autres. Tu aurais voulu en dénoncer la persécution invisible lorsque nous tremblions l’un contre l’autre comme deux frêles roseaux battus par le vent rigoureux et féroce des malversations irrévocables qui nous chahutaient.

Mais il est des moments où l’heure s’échappe, victime de s’être comptée. Une ligne se courbe et l’horizon tout entier en forme d’olive se broie pour ne devenir qu’une sombre tapenade. C’est la fourrure de l’avenir qui s’en retourne sur ses pas. C’est la confusion des souvenirs qui se libèrent sans aucun repère de temps. Oui, demain vient rendre visite à hier sans se soucier d’un ordre chronologique.  

Un destin émerge toujours des ruines. Sur un écroulement. Comme si la décrépitude était la disposition inéluctable à sa vigueur, comme si notre naissance au monde cachait dans le premier cri toute la désinvolture de la volonté humaine. Tu vois, nous sommes nés de la brume épaisse où demeure enfouie l’énigme cruciale, originelle de toute existence. Notre fatalité nous hante toute une vie durant. Nous pataugeons sans cesse dans nos décombres et nous les bravons de toutes nos batailles. Nous naissons de la lutte ouverte entre l’accroissement de nos cœurs d’espérance et les contingences tributaires de nos volontés. Nous coexistons avec la mort que nous tenons à bout de bras. Nous avons conservé du chaos l’évidence des marches brutes que nous imprimons à nos chairs comme la raclure des limons inassouvis laissés aux prémisses des univers. Nous collaborons à ce voyage intempestif qui dérange l’ordre inconnu des défaites et des victoires. Nous participons à ce toujours qui dénonce nos faiblesses.

Vulnérables, nous chantons le miracle des Sistres. Il y a quelque chose de primitif dans la sonnaille de nos coeurs. Sans doute est-ce pour cela que chaque amour est une révélation, que chaque jour neuf est un sourire tapi sous le couvercle de l’émotion sémillante. Tes palpitations sont devenues l’équinoxe de mes saisons. Je suis une crécelle suspendue aux buses de tes souffles. Dans ma cuve, je ronronne comme un chat attend la caresse salvatrice.

 

 

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