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LA COLLINE AUX CIGALES
16 août 2012

J’écris au dessus de moi. (5)

153

Tu vois, je remplis ton image des mots que j’ai amassés, conservés dans mon ventre depuis l’heure de ton départ. Ton image est fourmillante et mon sentiment s’ouvre à l’écoulement de la parole sans qu’aucune trêve ne l’embarrasse.

Des guenilles de vie, transportées malgré elles, affluent vers des contrées où l’on a oublié la langue parlée des jours lointains. Des tissus déchirés laissent dépourvus la raison percée de ses expériences les plus tragiques. Mais aussi quelquefois, ce sont les déchirures les plus belles restées recroquevillées dans la ferveur oubliée et dépassée. Des étoffes transcrites à la connaissance mutilée du monde. Une terre trouée par l’explosion de nos besoins. Une terre que tu as laissée si soudainement et qui persiste à hurler sous mes pieds. Tu rôdes dans mes cellules, cachée dans le teint vermeil de la langue. Et, tu t’infiltres en parallèle à nos sens éteints. Tu es restée présente dans le chambardement. La brisure est telle, qu’espérer la saisir, l’interpréter, en disposer, est aussi vain que de vouloir retenir dans ses bras la neige d’un printemps, cet œuf mort dans l’hiver. 

Tu vois, je suis replié dans l’échec du mot comme un mouchoir de peine. D’abord, statufié par sa rancœur, ensuite scellé au désarroi qui retient l’élan, le castre, le débauche de son invalidité à traduire. La parole entasse les contrariétés qui s’empilent comme des nuages avant l’orage. Les mots s’enlisent, la voix se crispe et se tasse. Le tumulte avale tout. Le mot martyrise le non-dit. Ses muqueuses absorbent le naufrage de la langue dans la contrition de son mouvement inaudible. 

De toi à moi, une tentative a échoué sur cette plage recouverte d’algues gluantes. Mais, ma main est cependant toujours là. Je pense à toi, intronisée, implantée à l’intimité de mes pensées. Notre joie est une graine de soleil qui dort. Et, je sommeille avec elle dans sa prostration. Entre le vitrage et le regard : des paravents, des couvertures et des fourreaux. Des tas de paravents. Quelle étrange chose que ces objets fragiles derrière lesquels on se retire pour se protéger des soleils qui les transpercent. Il me plairait tant de pouvoir traverser le miroir. Un pied dans l’autre face, le corps sorti de l’ombre comme ressuscité.

Faut pas toucher à la folie, à sa démence, à l’exhortation des tempêtes qui s’accouchent, se livrent et s’abandonnent à l’usure des longues flammes du désir. Le feu m’escorte jusqu’à l’excès. Une passion truculente, tueuse et lapidaire, déporte la lumière au fin fond du trou noir. C’est ma démesure la plus exaspérée, mais c’est sans aucun doute, ma préférence, ma délictueuse nausée, mon arbre à croissances où poussent dans le désordre mes sensations les plus vives et le plus délétères. 

Je vois le monde en le vivant de mes yeux. J’entends clapoter la haine insidieuse du pardon qui a mal tourné. Son murmure désoeuvré se répand à l’intérieur de mon être et mon ego en révolte claque la porte à tous les commérages de douceurs.

 

 

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Des mots pour dire, être, pleurer, partir et revenir..
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