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LA COLLINE AUX CIGALES
19 juillet 2012

La clarté des heures inhibées. (5)

nue_de_face_deboutDans ma mémoire d’étranges figures demeurent prisonnières. Mon existence est remplie de souvenirs artificiels. Ils gigotent dans mon esprit comme des illusions au bout d’une corde. Les barreaux de fer rouillent ma langue. Je racle pourtant à toutes les beautés. Mais le temps coupe tous les liens et la beauté s’inonde de banalités. L’exaltation s’efforce de demeurer contemplative. Il y a toujours du courage qui s’échappe par la fenêtre. Un filet d’eau coule derrière la machine à laver. Petite fuite inaltérable. Un trop plein s’extirpe de l’air. L’apnée du soulagement redistribue la closerie des choses. Tout est sous vide.

Une bicyclette en haut dans le ciel, et des milliers de cyclistes qui escaladent je ne sais quel sommet. Une toison verte emboucane les routes. Quelque chose s’efforce à vouloir poser son poids sur la fragile étagère de verre au travers de laquelle ton visage transparaît. L’image elle-même soupçonne la fragilité qu’elle fait voyager. Ma main plie la photo, et ton sourire se transporte dans mes veines. Ressacs d’écritures inscrites au fond des océans. Un cheval de mer sort d’une amphore. Les algues s’accouplent. La messe est dite. 

Nous ne partageons plus qu’un précipité de temps. Cependant, tu ne peux pas m’être plus proche qu’en restant ma seule destination. Avant d’entamer l’écriture de ces pages, j’ai longtemps attendu que la lucidité érode jour après jour l’angoisse de ta perte. Aujourd’hui, la passion et la démesure qui l’accompagne s’alignent naturellement sur le mur des fusillés. Mais ce n’est pas la balle qui siffle dans mes oreilles, c’est le déclic de la gâchette avant que ne s’expulse le projectile. Moi, dont le prénom descend de tes lèvres d’enfant, je porte ce manteau d’amour qui désignait ton premier fiancé rencontré à l’école primaire et dont tu as soufflé les syllabes à nos parents le jour de ma naissance au monde.

Tu as fais un balancier de tes cendres amassées sous le verre. Je guette l’heure où elles reprennent forme comme par miracle. J’ai les larmes salées de la retrouvaille. Tu reviens gommer le pluriel qui m’éparpille, et tu laves mes ombres d’un simple regard. En une fraction de seconde, la muraille de pierre dressée devant moi par les années amères se dissout comme une digue de terre anéantie, comme un barrage qui vient de céder.

 

 

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Commentaires
I
bonjour<br /> <br /> j'aime ce texte qui dit au plus près l'attachement et la douleur de la perte car au fond il n'y a rien d'autre à dire que cela qui nous touche au plus profond<br /> <br /> et le reste, tout le reste est un grand coup de vent dans les roseaux<br /> <br /> Bonne journée B.
LA COLLINE AUX CIGALES
  • Dépotoir et déposoir de mots, de pensées... Ici repose mon inspiration et mon imaginaire ; une sorte de maïeutique effrénée et dubitative et il me plait de pouvoir partager à qui veut bien.
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