Tout est magma d’ombres et de feu.
Tout existe sans moi dans la présence de ce monde. Je t’écris comme une vanne ouverte par laquelle le silence vient s’alléger. Que pourrais-je être sinon la maison de bois sur l’île volcanique aux nœuds de verdure ? Trop de rébus dans ma tête, trop d’abus. C’est l’inconstance de l’oubli jouant avec mon sang et mes lèvres. Les mots volent au-dessus des tourbillons d’eau. Ils se désagrègent dans la parole et rejoignent l’espace plat des plages où se démembre la lumière. Les lianes abattues, le sable encore chaud, nos mains sont des volières.
Et la lumière plus ou moins limpide se dissipe lentement. A chaque pas, la raideur se rapproche. La fixité de l’air déchire peu à peu le rêve qui m’entretenait avec toi. Avec la mascarade des sons et les masques qui cachent la pénurie, nous sommes tenus debout comme des stèles commémoratives. Dénuées de sens, nous coulons de la pierre en grain jusqu’aux vagues qui nous emportent. Il n’y a pas d’autre fuite que celle du regard. Il n’y a plus assez de terre pour que fleurisse le jour. Tout est si grand dans cette étape du monde. Je suis englouti par l’émotion qui me travaille.
Ton hurlement est si lointain, tes hanches si défaites. Le vent détourne ton visage. Tout l’insaisissable baigne dans mon cœur. L’espérance ne laisse pas de trace sur ma peau. Entre toi et moi, le couteau aveugle des heures vierges tranche la fumée au-dessus de la pinède.
Le brouillard est un compagnon trop souple et trop veule, il enveloppe notre amour dans sa redingote de fumée. Une chanson d’enfance se disperse comme un parfum de noce bleutée. Je me recueille en bas, dans l’ombre d’un nuage. Tu es partie, et je te retiens avec la salive de mes pensées. Je te revigore à l’intérieur de ma solitude. Tu es dans la crique où la tempête a lavé l’acide blancheur du désespoir et je te vois remonter avec l’aube comme un jet de lave rouge jaillit du cratère.