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LA COLLINE AUX CIGALES
24 novembre 2011

S’accorder au trait effacé.

san454s_titreJ’aime à croire pourtant que les histoires d’amour ne sont pas toutes des échecs auréolés d’amertumes, de mépris de soi-même dénié d’altérité. J’aime à croire, aussi, que l’amour n’est pas exclusivement subordonné à une physique, à une matière. Il me plait de penser que « … l’essentiel est invisible pour les yeux ». Mais, les battements d’ailes d’un migrateur te font faire du sur-place au-dessus des coutures de nos visages. L’émotion sait-elle que quelque chose traduit ses joies et ses peines ? Nos ombres démasquées voient danser des papillons sur les plis du vent. Les pensées en mouvement dans mon corps défient l’espace qui s’ouvre.

Ô combien il me plairait de ne pas renoncer à la joie en donnant un sens aux jours qui viennent.
Ma solitude est une porte défoncée, une coche pas encore notée sur la case blanche qui attend la rayure. La joie est punie lorsqu’elle reste sur le seuil, redoutant l’accomplissement comme une culbute prévisible. Un croche-pied à l’assiduité des épreuves et des délits. Une dégringolade pitoyable que la crainte et le doute s’empressent de tenir à l’écart. Des lumières naissent sous les dalles du silence.

Dans la neige toute entière, il y a toujours quelque part un flocon tremblant l’eau recrachée dans la masse blanche. Qui que tu sois devenue et d’où que tu viennes désormais, ma main tendue est un ruisseau d’humanité, une litière de semences prêtes à germer au premier rayon de soleil.

Tu clignotes à mes yeux comme une ambulance réfugiée dans l’urgence du manque. Ce rythme saccadé augmente mon attention et diminue mes certitudes à t’entretenir par ma seule pensée. L’absence épaissit la chair de la parole qui t’invoque. La vie est à l’aise lorsque tout se tait. La vibration est l’excavateur où se laminent les boutures semées dans nos moelles. L’amour nous éprouve par son obligation à nous sentir deux êtres totalement distincts. Il perfore le miroir où se renvoie l’image de nos ego. Une clôture translucide nous entoure et nous devons la franchir dans cette tentative de délestage. Car tu es, pour l’instant, cette orbite solaire qui enveloppe le vague des étendues disloquées.

Mais n’aies crainte, nous irons pas à pas débusquer et déchiffrer nos reliques. Elles ne conserveront pas indéfiniment le secret qu’elles paraissaient avoir. L’énigme s’oubliera elle-même dans le jour qui ne pose plus de questions.

A cet instant, délivré de sa pesanteur, elle prendra sa voie de retour vers son origine. Sortie de l’obscurité, elle pourra peu à peu contempler la lumière.

Tout ce désert intérieur que nous avons patiemment construit de nos expériences vivantes, il faut à présent le quitter, le refouler à l’extérieur de nous-mêmes et apprendre de nouveau à nous regarder sans plus nous définir, sans plus nous jauger par la carence. L’acceptation nous confond davantage. L’écriture est là comme un jardin pour nos corps de poussière. Elle provoque et contourne tous les volumes. Bientôt, nous serons dans le mot que nous porterons ensemble comme une gerbe de feuilles parfumées.

Entends-tu, toi aussi, claquer les portes, et le mistral qui s’immisce ?

Derrière nous est une terre abandonnée. Une lande à repeupler, un territoire à conquérir par de nouvelles promesses. Nous fécondons les pierres qui nous recouvrent. Une île vivante s’enlise. Nos cœurs sont des ficelles qui flottent entre deux eaux. Un sésame ouvre nos brèches et je t’entends retentir dans mes tripes comme un bris de vitre après un coup de tonnerre.  

Bel aurore aux yeux tourmentés tu te répands encore là où tout n’est que pardon. Nos mains fanées ressemblent aux feuilles que les arbres relâchent chaque automne. Le ciel se donne des gifles lorsque tu t’envoles parmi les rêves cloués à l’aveu du jour qui grimpe dans ses miradors de lumière. Il nous faut quitter toute résistance et nous confier librement à la nature de nos êtres.

Regarde, dix-huit ou vingt lumières sont restées accrochées au bracelet de nos enfances. Et la clarté a la beauté de tes yeux lorsqu’ils se tiennent debout sur l’écho couché devant eux. Dans chaque amour naît une prison acceptée. Nos barreaux sont autant de suées.

Nous habitons le monde dans la dispersion inévitable qui peuple la route invisible reliant notre entendement à notre cœur. Nous allons vers nous-mêmes, hors du réduit des courbes, hors de cette vie de misères vacillantes. Nous nous sommes chantés par ce filtre de lumière où nos voix se sont rejointes. Nous avons écouté nos messes d’amour et de désastre au cœur même de notre église intérieure. Et chaque silence est devenu une ascension vers ce sanctuaire où le dépouillement ouvre la voie à cette unité d’émerveillement dans l’arche nue et vaste qui recouvre le désert de nos vies. Notre fatigue meurt dans le vide, et l’essentiel nous (r)appelle.

A son commencement le détachement est brimé. Il marche dans les roseaux, il se dérate à l’ombre des cailloux, il fuit l’instant qui le condamne à suspendre.

Ton visage s’agite dans ma mémoire. Il faut désimpliquer les yeux. Il faut le raffut des naufrages. Couper l’amarre. Couper le lien. Partout des épines, partout des griffures.

Au petit jour nos cendres se couchent sur le vent. L’ardoise a l’odeur de la craie. La main du désir a retrouvé la porosité de la nuit. Mon corps cherche à virer à bâbord. Et puis il y a cette impression que tout piétine mon enfance redevenue le berceau des premières aubes. Les jambes écartelées l’ombre pousse des cris. L’aube se reconstruit dans tes yeux. Je n’ai rien préparé. Je n’ai aucun bagage, mais il faut partir.

Ton présent sur mon présent, j’avance vers la déchirure. Et je ne dis rien. Il fait froid, il fait vif. L’air des sommets de givre glace ma langue. Comment apprendre à se détacher sans décongeler jusqu’à la première empreinte ? Il n’est plus question de regarder autre chose que la clarté au fond de l’eau. J’ai peur. Avant toi et après toi, le néant. Le vide absolu qui ne sait rien de l’émotion.

 

 

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