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LA COLLINE AUX CIGALES
15 octobre 2011

Écrire comme on meurt de ce qu’on vit.

Écrire, c’est se désapproprier du feu qui est en soi. C’est s’abandonner à l’air, c’est passer avec lui, c’est se résumer dans le souffle. C’est se jeter hors de soi avec la furieuse envie de se sentir plus léger.

Le silence abdique sous l’autorité des émotions fougueuses. Je n’écris plus pour te dire, mais pour exulter de moi la graille tournoyante de la puissance qui me ronge. J’écris comme je me parle en moi-même.

Les fuseaux horaires de la parole décalent le présent. Je suis intimidé par la pulsion narrative. Je n’ai rien à dire d’important sinon moi-même, mais je nettoie ma pensée comme on lave de la vaisselle. J’essuie mes ombres comme une porcelaine. Tout est moite jusqu’au moment du vent. Je ne maîtrise pas ce que je deviens. Je sens que le temps ne me le pardonnera pas. Je sens l’inutilité du détachement. Toute la nuit se désempare de la nostalgie du jour. Je vire comme une baudruche s’empale sur des yeux anonymes. L’extérieur n’a rien à faire ici. Je suis dans l’ailleurs, mais dans l’ailleurs qui est mien. Je ne cesse de me reconstituer de ce que je ne suis plus. La foudre s’abat sur ma langue et aussitôt ma main relaie les mots qui montent jusqu’à mon vertige. Je ne te parle plus, je me parle. Ma salive, c’est toi.

Écrire, c’est s’effondrer. Après la glaciation, j’imagine que la langue se réveillera comme une prune tombe de l’arbre et roule jusqu’à toi. Tu la ramasseras peut-être. Son jus coulera dans ta bouche. Alors, nous esquisserons peut-être le verger qui nous tend les bras. Alors, le silence reviendra.  

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Commentaires
P
"La foudre s’abat sur ma langue et aussitôt ma main relaie les mots qui montent jusqu’à mon vertige"..<br /> Merci, B.<br /> C'est une sensation ressentie qu'il m'est absolument impossible de décrire, là, de lire ce texte..<br /> plus singulièrement ce passage attrapé là à la volée de ce que mes sens vivaient au présent en suivant les mots, haletante..<br /> Ce passage, je lui ai trouvé une couleur rouge-orangé, la couleur du feu, oui, et je l'ai senti chaud, en son coeur..<br /> J'aime vraiment beaucoup la verve qui s'en dégage.<br /> <br /> Ca me fait du bien, ces lectures..merci B.<br /> Un pissenlit
S
Ecrire, c'est habiter ailleurs et parfois, cet ailleurs devient sa première maison..
LA COLLINE AUX CIGALES
  • Dépotoir et déposoir de mots, de pensées... Ici repose mon inspiration et mon imaginaire ; une sorte de maïeutique effrénée et dubitative et il me plait de pouvoir partager à qui veut bien.
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