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LA COLLINE AUX CIGALES
11 août 2011

Désincarné, l’espoir est un chantier.

imagesCASSAU03Le désir est un espoir qui s’ajuste constamment. C’est une promesse incertaine et modelée par la limite inatteignable. Il n’est pas seulement, dans l’ignorance de sa disparition, l’illusion ligotée depuis l’aube affamée. Il navigue à fleur de l’air. Juste ce qu’il faut pour m’empêcher de me tuer. Pour éviter de m’achopper à la nuit insatisfaite de l’infini.

 

Jouissance prisonnière de son échappement, plaisir soumis à l’acte effaceur de la nourriture visible. Je viens tarir le soleil comme une plante assoiffée. La nuit me permet de rallumer les lampes. Je dors éclairé par la fiente du jour devenue combustible.

 

Désir borné. Désir de vivre dans l’échéance. Azur en brèche, moteur de la nuit où s’étalent les ombres ressourcées de nouvelles orientations. Le désir meurtri marche d’un pas fébrile. Le sol disparaît sous le pas. Quelque chose s’enfonce dans l’air qui caresse la peau. J’ai encore soif, la main ouverte comme un œil vorace. Je compte la monnaie qui reste.

 

Dans notre pierre, la tempête. Le vent dans la roche. L’ultime jaillit de chaque vague, puis les coiffe, puis les remue et les retourne. La falaise est creusée. Il n’y a pas de terme aux contre-courants. L’eau bouillonneuse trouve la grotte. L’écume déferlante se retire sous le menton émoussé des mots rebutés. On ne peut dire toute l’écume qui efface la parole restée dans la cognée des jours déferlants. Les murmures brouillent les pistes. Le brouillard tangue les esprits et l’existence s’éternise à trouver son vocabulaire.

 

La vie sans l’oubli de la mort, c’est l’instant qui s’encombre. Le présent, éternel éphémère, cogne son nez contre la vitre du tout-le-temps.

Nous nous sommes tenus l’un contre l’autre comme des amants, comme des roches solidaires de leur chair. Le souvenir impérissable qui ensuite a occupé mon esprit est devenu un passage obligé là où tout se reconstruit sans cesse. Le désir de retrouver la sensation d’émerveillement a nui à toutes autres alternatives. Et, je suis mort mille fois du plaisir que je n’ai connu qu’une fois. Rien ne dure que l’appétit !

 

Peut-on aimer sans espoir ?  Tout est dépeuplé par la seule absence d’étincelles lorsque le noir nous maudit. On attend toujours un événement, une ornière par laquelle passerait un peu de lumière. Une fissure béante qui laisserait s’écouler et des crasses et des merveilles. Sur des gravures imaginaires, des silhouettes jouent à cache-cache. Un visage flou et difforme s’avance sans mot. Le dialogue intérieur s’invente.

 

Il y a quelqu’un qui manque ici ! Il y a une trace vide, un regard de sacrifice. Une perte indéfinie. Il y a dans le dormant toute une panoplie de gestes et d’apparences périphériques de je-ne-sais-quoi, de presque rien. Un monde chu envisage de transpercer l’écran de mes songes. J’attends depuis si longtemps. Et ce différé est devenu une diffamation, une bévue d’arriérés grotesques qui font le pied de grue aux portes des souvenirs désarticulés ne trouvant pas de repos à leur sort. Il y a tant à faire et à dire, pourtant. Il y a la redondance de l’impatience qui fait mouche sur la vitre transparente.  

 

Que d’afféterie et de faux-semblants inoculés dans cette attente ! De l’angoisse à l’extase, se confond délibérément l’effort de soi en exploit jaillissant. Il est nécessaire de retourner les yeux du dedans au dehors. Parce que l’infection est dans l’introspection. Parce que le leurre devient supérieur à la nécessité. La douleur s’y réfugie comme une maladie accompagnant nos refrains martiaux et nos rengaines d’incertitudes guerrières. Une mélopée glauque où résonnent nos effrois et nos dérives. Tout chavire en permanence. La solidité est une vasque ébréchée par les sensations. L’émotion prodigue ses effets de mollesse et les contractions prolongent le vide jusqu’à sa défaillance. Rien qui soit définitif ne demeure.

 

Il nous faut laisser la mer venir s’installer dans le creux de nos tempêtes, lui laisser ourler de sa fureur la masse glauque de nos emportements. Notre rage se moque bien des vapeurs et des évaporations. Les vergetures de notre sang évoquent la surdistension de notre épopée, mais restent muettes sur ce qui s’est incrémenté à la lisière du sable et des salins. Pourtant cette effusion rongeuse prononce une collorette asséchée où se retient quelque chose de pur. Quelque chose de dense, quelque chose qui n’a pas d’appartenance et que l’on utilise chacun à sa manière.

Nos océans dans leurs étendues impressionnantes articulent le rejet des soubresauts que diligentent nos refus et nos révoltes. Mais, la résignation vient seulement lorsque les apparences occupent pleinement l'espace de nos regards. Parce que le sujet de l’étonnement parodie l’excellence du mouvoir. Il lui attribue les habits et les décors de sa mise en scène.   

 

Probité laconique du paraître qu’aucun masque ne sait véritablement camoufler. Amour vainqueur, amour despote, ton visage plaide en faveur du monde qui commence par le mien. Te vouloir, c’est l’élan égoïste de ma manifestation à te pénétrer l’âme comme une lueur se convertit à ta pudique luminosité ; te vouloir, c’est ne pas céder à l’oubli qui transfigure mon être en un saltimbanque, une marionnette sans fil. Te vouloir, c’est défier chaque sensation pour en décortiquer la part juteuse dans le minéral dénudé de ses atomes imprégnés au jour, dans cette jarre pleine d’exclusives perceptions.  

 

L’indolence de la convoitise me réduit à l’immensité et par des effets opposés m’amplifie d’une ardeur que j’ignorais. Le désir nettoie la parole de ses mots d’injures. Ceux dont l’aveu se résume à l’assouvissement sans le plaisir, ceux avec lesquels la dominance guerroie sur l’objet convoité. Nous exprimons nos déblatérations à coups de langue : victimes coupables d’avoir envie sans avoir besoin ; bourreaux sans pudeur d’un amour de soi enchevêtré à la racine d’être. Dans la caricature le vent étend ses ramures. Il reste l’instant brut clapis derrière le mur du dérisoire. Un linge humide abandonné sur le fil des déconvenues. On tourne le dos à l’horizon froissé et c’est la jubilation du désastre qui se reflète sur nos nuques nues.   

 

La rage d’être s’incarne en courtisane pourvoyeuse d’effusions sentimentales. Que tout soit ramené à sa forme première, aux berceaux d’illusions aguichantes, aux certitudes ankylosées, à la vie tremblée, aux introductions de la parole sans oracle. Sommés à comparaître, ils le seront, quoi qu'il advienne. Le visible sénile et impotent demeure un démenti en profondeur pour quelque temps encore, avant la rançon prolongée, avant la libération de l’innocence et de la viduité. Chacun s’accordant à différencier le féerique du réel, mais tous unanimes à souhaiter que la magie soit plus forte que le quotidien répétitif dans lequel on s’ennuie d’une oisiveté oppressée.  

 

Un désir sans amour renforce l’animal qui est en nous et pare l’inné de ses plus beaux manteaux. Mais, il n’y a pas d’amour sans conscience, sans choix et sans abandon. L’amour est un état, un rythme biologique, une cadence sociale, une onde perçue par la disponibilité de notre être. Il ne peut se définir autrement que par chacun, c’est son paradoxe avec son universalité.

Un désir qui ne projette pas un plaisir est une idée morte suspendue à nos attentes. La langueur qui l’accompagne est une frasque de plus à notre musée d’artifices.

 

Viens. Aide-moi. Il faut égrener du plaisir ce qui en est la source, son moteur, son inspirateur. Sans suppositions d’allégresse, aurions-nous autant de désir ?

 

L’irrécupérable ne cède pas. Ce qui s’est envolé demeure un mirage désaltérant la pensée. Toujours prête à se développer, la disparition se conjugue au manque. Nos rives descellées, un bol de feu navigue au hasard des terres qui se décollent du sommeil. Ce que nous avons perdu, nous le retrouvons ici, dans l’aspiration des vagues. Le roulis de l’absence enrobe jusqu’à l’écume de mon être. Je suis forclos. Absente, tu endoloris la sensation qui te fait naître.  

 

L’horizon visible trompe la réalité mourante dans l’écho d’un rêve. De toute façon, on ne croira pas au cauchemar tant que nous resterons éveillés dans le sommeil. Le manque a trop d’envergure.

 

Quand la terre repose sur une esquisse griffonnée, les crayons de couleur de l’enfance s’appliquent à enluminer la flaque d’eau qui est restée collée dans le ciel.

 

Je persiste à caresser ta joue pour parler à ton cœur, ce lieu d’émotions vives où se sacralisent même les déformations issues de l’interprétation.

 

L’absence est toujours un rendez-vous avec soi-même.

 

Nous sommes libres de nos défaillances et de nos asticotages, tripotant sans cesse nos rêves d’enfants, nos romances en guise de sucette dans la bouche.  

 

Sous le chapeau des heures distendues la mémoire et l’oubli s’entrechoquent. Ecrire déforme l’inachevé. Les mots se rebellent. Ils suivent l’histoire qu’ils racontent sans pouvoir couturer la nuit blessée.

L’orgueil qui prétend m’alléger m’emporte comme le vent et partout où je me croyais lourd comme un rocher, je vole comme une plume. Mon vœu de retrouvaille est un plumeau déhoussé. Le temps est un voleur. Il chaparde nos plus belles cérémonies.

 

Ici et maintenant, tout est démuni par ta seule absence… La nuit croise ses fils d’étoffes échancrées et les brumailles de nos pluies de brouillons. Elle tisse des témoignages incroyables et une nuée de pagaille s’étire comme un tissu invisible recouvre ta mort. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle je t’invente lorsque tu me manques. C’est d’ailleurs ce qui fait surgir le besoin même lorsque l’envie a disparu. Je suis du désir. Je suis une volonté. Je suis une émeute. Tout ce qui me relie à toi est besoin. Quelque part, une source coule sans se soucier des ruisseaux qu’elle dévale.

Tout tangue, tout se poursuit, tout se transforme. Une mouche s’est posée sur l’heure. Le temps est moucheté, il pègue comme une sangsue. Le fil de nos lèvres posé sur du givre s’incruste aux muqueuses du jour. On ne voit plus rien dans la blancheur qui pénètre nos paupières. Tu te faufiles. Tu me vaporises des rivières que nous avons traversés. Je me désole de ce qui est perdu, et toi, tu infiltres de la poésie à l’obscurité dans laquelle tu me transvases.  

 

… Dans ton désir muet ma voix ardente se fige. Cependant, nuls superflus … Ton besoin est à la transparence de ma vitalité. Il me faut surmonter l’illusion d’aboutir pour me suffire. Tes lèvres sont l’accueillant de ton corps mais mon désespoir est de ne pas pouvoir me greffer comme le font les nuages précédant l’orage venu purifier l’émotion. 

 

On peut s’immoler individuellement, comme martyre de ses propres culbutes. On peut aller au bûcher la tête haute, avec le cœur dans la poche. On peut faire semblant d’exister, en évitant d’être dans l’affirmative de ses propres consentements. On peut aussi vivre dignement dans le pardon de soi qui se reflète sur ceux qu’on aime. Qu’importe ! La rectitude des obligations que l’on se fait à l’égard des autres nous conduit bien trop souvent à nous étrangler nous-mêmes avec le sourire. Futiles discussions de courtoisie qui se posent là où l’on s’oublie. « Beau temps pour la saison », dit-on d’un ton fugace. Les mots que tu verses de ta bouche n’ont plus rien à avoir avec ce que tu vis.  

 

L’intérêt de soi se blottit en rangs serrés dans les méandres de l’incongru. Prêt à nous happer, si nous n'y prenons garde. Afin d’oublier un peu ce qui fait mal, ce qui fait peur, il ne faut pas dire ce qui ne sera pas compris et se soumettre au silence. Il lui arrive d’être salvateur. Partager seulement le corps présent qui ravine l’esprit. Mais la pause est traîtresse, fourbe de ses retours violents, elle laisse croire à l’apaisement que le dernier mot appartient à celui qui parle après tout le monde.

 

Or, tout à l’heure, après le répit, l’essentiel restera croupis sous le ventre insipide du quotidien, et il sera trop tard.

 

De l’amour se décrochent des gerbes, des bouquets de ronces en fleur, des cimetières embaumant l’air du sucre des histoires passées. Une promenade désespérée se dérobe et se résorbe perpétuellement dans l’attente qui s’est maquillée en tombeau dans l’alignement horizontal où dorment les jours qui ne peuvent plus recommencer.

Parce que c’est dans cette marche qui croise l’infini qu’on arrive à soi. De l’affectif ou du néant, il faut trancher. Et, je crois, c’est par la colère de la frustration que l’on réapprend au mieux le courage d’affronter.

 

Il est vain de choisir un ailleurs qui ne nous habite pas, comme il est inutile de remuer une terre qui ne donne pas la fécondité espérée. La vérité crue lancera toutes ses pierres, ne ménageant pas toutes les séditions fendues et béantes. Tu t’exclameras quoiqu’il en soit en ramassant l’ombre pour te faire un fouloir. Tu creuses dans mon récit, dans les mots eux-mêmes condamnés à la flamme incurvée à l’inassouvissement. L’affirmation brinquebalante expire dans le bercement des syllabes rejetées de l’alphabet.

Je mords la poussière. Jusqu’à l’épuisement.

 

Ma source vive, ma raison d’être est dans cette attente ; l’insupportable gicle sans procédure particulière lorsque je me sens exclus. Radié de moi-même par les autres, je n’existe que dans la pauvreté de la survivance. 

Toi, ma seule idée de tendresse dans une nuit clôturée comme un pâturage où l’herbe ne repousse plus. Le désir ne sait plus où donner de la tête. Dans le ciel rouge reflètent nos jardins de bonheur sur la fine pointe de l’horizon. 

Je ne sais pas ce qui s’essore. Un trait noir me sépare de tes yeux. Le silence entre des bouffées de tempête, une dérobée sans trace de vol, inimaginable comme une lune en plein jour de janvier. Le désir se colle comme une tapisserie dans la chambre du recueillement. Il devient une prière sur les murs, une incantation sur le plafond où dansent des flots d’émotions tremblantes. Diluée, tu rejoins la matière qui se dilate dans les remous de mon cœur. 

 

Le désir n’exalte pas une nécessité justifiée. Il nous parle de sa voix sourde. Une ruche abritant une promesse de miel s’immisce à l’intérieur de l’accent qui porte la voix. Pour saisir ce qui s’enfuit, déborde et se dilate dans un silence stupéfiant, les algues arrachées à la langue mendient aux rêves étouffés.

 

De toute évidence, il semble opportun de se retrancher à l’écart du monde pour mieux lui accorder son existence et ses périples, pour le défendre et le faire briller, d’une écriture née de la divergence et de l’hostilité des ondulations intestines. Mais d’abord le désencombrement. D’abord l’allégement de la réalité qui s’accorde à la conscience. D’abord, le détachement. D’abord le rapiècement de la vie dans la mort ; la césure de la mort primordiale mise à l’index comme la projection d’un vide entre toi et le chaos.

 

Le désir, tel un événement métaphysique, explore les âmes dans leurs souffrances, cherchant des solutions au moins provisoires.

Combien de choses gobons-nous sans vraiment les comprendre ?

 

Souffrir d’une insuffisance d’être ; mourir à soi-même de soi-même : la vie elle-même est ce sursis qui rend l’immortalité définitive parce qu’elle est vouée à l’anéantissement.

Nous transportons tous une guerre qui meurtrie nos élans au fond de nos entrailles. La mienne m’a coûté un bras et une jambe. Je ne m’en sors pas trop mal. La tienne a brisé ta vie.

 

La nuit rampe sous ma peau. Des éclats de rosées compriment l’aube d’hier où le ciel s’est jeté sur la mer. Il ne sert plus à rien de dire. La buée a disparu comme des mots s’effacent sur une ardoise, il ne reste que la voix vide et la peine transbahutée d’ombres en ombres. Et, l’ombre est devenue rugueuse comme une toile émeri. De la poudre d’air dégringole en avalanche.

 

Tout est amassé au bord du gouffre de la peur. Reste seulement l’effigie d’une volonté invisible, seulement des tombes sarclées par la démesure et l’absurde.

 

Dans la constance de la veille demeure la flamme incorruptible pour mettre dans ta vie tout ce qui manque à la mienne, c’est sans doute cette complémentarité partisane qui s’offre au désir comme le besoin le moins effronté.

 

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