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LA COLLINE AUX CIGALES
7 mars 2011

A mourir de vivre.

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La compacité de l’heure mémorisée, mémo statique, mémorable, mnésique, nous attache, et il me faudrait assiéger le temps qui fût tien pour te rejoindre à l’unisson des chants dépouillés. Mais, désynchronisés, je me cale, comme une aiguille collée sur le cadran de l’horloge abandonnée de ses aiguilles. Nos archives sont indestructibles, impérissables, et te refaire vivre, c’est mâchonner la gangue de ta présence dans l’illusion d’un réel fondu au néant. Le temps s’y écharde. Mon temps y peuple les heures de chair et de disette. Je perche, tout en haut, sur les claustras de l’inconditionnel comme un perroquet du souvenir, un pirate de la mémoire, un renégat de l’absolu.

Le « petit moi », la part mortelle, le thumos, c’est la nuit où je te dors, allongé dans un bras d’honneur, dans l’ironie des rhétoriques sarcastiques.

Je suis engouffré dans cette mémoire impalpable, étherique, qui ne divulgue rien avec des mots, qui ne raconte pas l’histoire des hommes, mais qui la transporte parmi eux : une mémoire du néant gluant de son épaisseur poudrée de colle, de sa vase stellaire et ses ondes telluriques, de ses feux liquides et de ses pitances informulables. Je suis de cette vie qui s’arrache à la mort, qui répond du bercement des étoiles et de l’univers. Je suis scellé à l’aventure qui conjugue, assemble et attache. Dans mes cloaques, ta mort parle à la mienne. Le temps sans issue s’élargit de lui-même, se gonfle et se dilue. Informe, brutal, sans lendemain. Et, je t’invoque dans le pardon du toujours. Et, je te traduis des ténèbres comme une tumeur d’ombres flottantes que la fatalité absorbe toute crue. J’habite l’effarement, j’habite le rêve où naît la réalité dilatée comme un labyrinthe démesuré, exagéré de ses protubérances à produire de la foudre dans le frottement des poussières. Ma mémoire est une récolte et une vidange. Un lieu sans lieu, une épreuve sans combat, une existence sans vie terrienne. Seuls, nos sommeils sont des rencontres. Seule la mort dans l’âme m’a donnée le jour dans le profilé du quotidien, dans le suintement de nos nuits d’argile pétrissables. Ecoute, un sablier anonyme se déverse encore sur la membrane fragile de nos exactions irréparables.

Mon secours… je le cueille dans l’aumône chétive de suffisantes sustentations, et cette prothèse du babillage fredonne à notre insu, le bruit des vagues qui nous ont recouvertes, puis baignées, puis noyées jusqu’à nous faire disparaître dans la lumière fraternelle.

 

Mais, regarde, la mort n’a rien pris, n’a rien ôté. Tout mon être disponible t’a rejoint depuis toujours. Plus encore, il ne t’a jamais quitté. Je suis né avec toi présente dans mon berceau. Tu es encore là. Ce sont tes mains qui bordent mes jours. Ce sont tes lèvres qui dans leur pyjama de coton dorment dans ma bouche.

Le mot ne vient pas de la douleur qui l’étouffe, il jaillit de mon tréfonds lorsqu’il a décidé de ne plus se supporter lui-même, lorsqu’il est devenu un marbre trop lourd de son mutisme. Nos voix sont alors le porte-parole de nos troubles s’exhortant de leurs tributs. Et, nous chantons, et nous pleurons, à l’intérieur de nos carrières tendres d’une même intensité sonore.

 

L’univers tout entier est replié dans un grain de sable, et toute la vigueur du monde se découd dans l’heure qui le féconde. La mort assise dans les souliers de celui qui va, de celle qui s’en va.Puis, le pas accélère sa cadence. Le pas foule nos espoirs déchus comme des misères brisées de leurs vaillances de cristal. Il avance. Il tire vers devant, déligotant nos envolées restées à quai, déliant nos embardées jusqu’à lors maintenues dans la cale sombre de nos retenues les plus extravagantes.

La vie ne défend plus rien. La vie abandonne sa peau mutante. Elle largue sa mue grotesque sur les flancs ridicules des heures nourries d’illusions tonitruantes. La vie soupire dans la mort qui nous sourit comme un enfant regarde sa mère.

Mourir c’est se concentrer tout entier en un seul point, une seule note. Un point de non-retour, un point insécable, une musique claire comme une fontaine de silence. Mourir, c’est naître dans l’invraisemblable léthargie résolue à l’hibernation de la matière à laquelle nul cœur ne peut se résoudre. Mourir a pourtant été ton impératif, ton espérance ultime à trouver le repos définitif derrière les cloisons de la déception et du mal-être capricieux. Nos vies nous les avons vécues alors comme des impératifs dilatés, des nécessités ventrues, des exigences têtues. Et, nous sommes maintenant condamnés à poursuivre la route que nos glaisières ensevelies chevillent à la persévérance de l’amour.

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