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LA COLLINE AUX CIGALES
20 janvier 2011

Il faut que la secousse remue le bout du jour.

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Des remontées de mémoire viennent ici piller l’instant. Elles s’emparent de nos entrailles et se hissent dans les filets des jours heureux qu’elles ramènent à la surface comme ces gouttes d’eau salée sur le bord de nos yeux. 

Le sommeil est une archive du temps qui a connu l’ascétisme frugal de l’heure comptée et mesurée. Nos rêves ensevelis sous la chape de brouillard sont des sauvetages et des secours où la beauté s’est précautionneusement assoupie au fond de nos êtres. La beauté se cache toujours avant d’éclore. Elle redoute la clarté du jour. Sa splendeur lumineuse est une ébauche qui soupire dans la profondeur. L’esquisse doit être cueillie comme un pétale de rose que l’on porte aux narines pour en humer le parfum aphrodisiaque. 

C’est dans le jaillissement de ton ombre que je bois. C’est dans ce lieu où se rejoignent les cœurs séparés. Exactement, là, où l’insuffisance épouse la nécessité et filtre le désir. Nos sarments secs sont les premiers à s’abandonner aux flammes. Nos vignes anciennes s’embrassent ensuite comme des bûches arrachées à la nuit. Et, tu vois, j’entretiens toujours ce feu pour que la nostalgie ne soit pas seulement de la tristesse. Je persiste à l’alimenter de ces écorces fortifiées par la mort séparatrice. La voix traînante au fond des puits est délivrance. Mais, Il ne suffira pas d’assembler les engelures comme les pièces d’un puzzle dessinant ton visage. J’irai pieds à terre décroûter ton exil. J’irai par delà la trace d’écume déshabiller les îles semées de métaphores où ta silhouette s’enfuit comme une traîne moelleuse au dessus des lagunes que le ciel a oublié. 

La nostalgie s’ébroue comme un chien de mer revenu sur la plage avec dans la gueule une bouteille contenant encore le billet doux d’un Au Secours dont les lettres sont presque toutes effacées. Qu’importe.

Une identité au-delà du sang de la parenté. Un nom pour dire au silence que l’oubli n’est plus seul. Parce que demain c’est toujours la possibilité que le cœur s’arrête et d’imaginer son vacillement comme le malaise qu’éprouve le sucre lorsqu’il suppose être l’élément de trop dans une confiture. Les distances se précèdent, s’intercèdent, s’accolent et continuent. Le temps n’a pas de répit. Il se répète de sa chevelure blanche jusqu’à la tête à peine coiffée d’un nourrisson. Partout la tristesse d’hier déjà partie. Partout les lances de lumière portent le volume du jour sur le seuil de la porte à venir, pourtant déjà entrebâillée.

Tout s’en va, se détraque, s’enraille. Tout reste. La vie têtue s’épuise à parler la langue des envergures, des engelures et des instants révolus restés agrippés aux foulards qui serraient nos gorges. Tu as dévergondée l’heure et délogée la joie. Des nuits entières parsemées de gouffre. J’ai du fouiller et chercher cette montre que tu as emporté avec toi. Cette horloge sans rythme où plus rien n’a de saccades.

Et puis, tout ce regret inséminé aux heures passées qu’il faudrait pouvoir revivre afin de les essorer du parfum des joies que nous n’avons su traduire au bonheur. Tout cet alcool évaporé avant que nous ayons su en extirper toute l’ivresse. Des regrets qui fanent dans les ombres. Des soupirs lamentés où s’abreuve encore le lac de nos peines.

Parce demain ne sait rien de la saveur d’hier, il faut l’assaisonner et l’affranchir de nos délits. Peut-être saura-t-il en convenir pour se construire. Peut-être prendra-t-il dans sa mâchoire de crocodile les braises cendrées de nos gestes irréalisés et leur offrira-t-il l’exutoire rédempteur.

Tu vois, chaque joie est issue d’un combat, d’une lutte incoercible entre la vie que l’on rêve et celle que l’on détourne par des artefacts complaisants pour répondre aux besoins de nos réalités, aux ressemblances trop vraisemblables.

J’ai hérité de toi malgré toi. J’ai hérité de ta vie malgré la mienne. Demain est un jour que tu ne connais plus. Moi, il me faut l’ouvrir comme un livre où les pages sont blanches. Il me faut t’écrire pour ne pas laisser au temps le choix de ma dérive. Les mots que je t’envoie sont ces petits crépitements auprès desquels je m’assigne à résidence avec l’espoir que nous habitions la même dans une réconciliation et une réunification significative.


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Commentaires
B
Chaque joie parle d'un combat ou d'une mutinerie. Nous serons naturellement les échos de nos tourmentes, et bien sûr nous redécouvrirons l'aube dans sa fraîcheur candide.
S
Des profondeurs de nos rêves, notre futur cherche l'espérance..et la route dans les ténèbres est si longue. qu'il faut parfois l'aider à trouver l'aube.
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