Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
LA COLLINE AUX CIGALES
7 juillet 2010

Combler le vide, tarir le néant.

f2c86aefd0

Je ne saurais fragmenter le souffle de ton absence. Etourdi et atterré. Mon histoire et mon vécu réfléchissent les taches cachées derrière le soleil. Tu n’es que passée dans ma vie, et si je flanche encore à vouloir te réanimer par mes tentatives bruyantes et anarchiques, je sais néanmoins que tu es maintenant lointaine et inaccessible. Je sais que je te sollicite à l’épreuve de mes tourments, reposant sur toi, le poids de mes angoisses à te survivre. Nos jours se rétrécissent. La terre est un caillou. Je t’éprouve de ma solitude, et tu t’écoules de mon impuissance. Ici, l’émotion est vaine. C’est la nullité et le vide. 

Tu voyages dans cette ombre que l’on oublie peu. Tu es une charrette et moi je la tire devant sur le talus. Tu es un herbier où se replient et se concentrent les parfums d’eucalyptus, et moi, je m’enrhume et j’éternue pour te sentir à pleines narines. L’avenir se plafonne à la couleur de tes yeux. Le passé devient une rose où s’endorment les adieux.

Pourquoi le besoin d’entendre une voix et la certitude du silence sont-ils si chargés d’angoisse ?

Te perdre n’est plus une perte. Ni un combat. Ta mort s’est fixée, ici, dans la chair pour donner une existence à un passé fragile, morcelé, fuyant. Rien n’est vraiment discernable. Tout s’enfuit, fluctue, se transforme, s’échappe, se dérobe. Une sensation étrange des jours qui se rétractent. Je me souviens, et c’est intemporellement que s’alignent dans l’alliance les images et les sourires dont j’ai perdu le son. Une dilatation à l’envers des événements où je me perds dans l’outrecuidance des faits.

Combler le vide, tarir le néant… comme si l’impossible était une deuxième peau, comme si un chapeau de poussière recouvrait la larme enfoncée dans les lamelles de l’éternité.

Que dire de ces portes qui s’ouvrent et qui se ferment, au gré des soupirs ? Que faire de ce temps déposé dans un panier à mes pieds immobiles ?

Vivre n’est pas une raison en soi… Vivre s’accouche et s’engendre dans la permanence confuse de l’aventure à exister. Vivre, libère et absorbe en même temps, délie et attache, ruine et bâti. Aimer, ne serait alors qu’un alibi, un témoignage de notre impuissance à être d’une entière ipséité. Et, je suis d’une altérité décortiquée, épluchée, éparpillée et mutilée. Blanchi à l’épure de la lumière qui brûle et tisonne. A la croisée des routes de la présence réelle ou virtuelle, dans la déroute de la sensation. Vois, combien je m’agenouille au chagrin comme d’autres se soutiennent au brancard de l’insouciance, au palanquin de l’ignorance. Lourdement. Opprimé et rendu.

Car chaque isolement dans son mûrissement incarne l’utopie du monde.

Chaque part de nous-mêmes s’élance dans la quête introspective du silence des glaces restées éternelles, des cavernes estampillées des fresques d’un temps humain révolu. Chaque émotion grave nos voix dans la pierre buveuse d’eau, buveuse de vie, et nos ventres sont des halles de résonance où nos cœurs rythment l’écho de nos soliloques comme le battement de tambour donnait la cadence sur les galères romaines conçues pour le combat. 

Nos solitudes sont des passerelles, des bateaux ivres, des radeaux de fortune, accrochés à nos élans comme des ombres oppressantes défiants les frontières de nos peaux. Mille absences grouillent tout autour. Mille échafauds prêts à couper la tête aux images qui s’enfuient. L’absence et le manque ne font qu’un. La solitude fermente dans la débâcle de l’innommable, de l’incommensurable. De l’instant frugal et avide jaillit la foule de visages de notre mine à souvenir. Certains viennent à nous comme des évidences d’autres comme des révélations, et d’autres encore traversent notre esprit sans s’arrêter. Ces identités quelquefois perceptibles sont des présences incrustées aux parenthèses de nos déserts. Nous les ressuscitons au cœur même de nos humanités, de ce no man’s land incontrôlable, de cette terre asséchée de raison, de ce fond de l’œil où réside, sans aucun doute, un peuple endormi au fond de nos regards.

Etre seul, c’est animer les autres en nous. C’est mûrir sous nos paupières la vie secrète de la double existence de sa propre vie, dans une coopération souvent tumultueuse.

En dehors d’un éclair de lucidité, être soi tout entier demeure un impossible rémanent. Il ne se peut la fusion des ombres à ce que nous admettons de nous.

Publicité
Commentaires
M
Tu racontes fort bien ce qu'est la survie ...
S
En dehors des éclairs de lucidité... on n'est que soi.
S
Les battements de la solitude font tressaillir les jours vides de mots. Faut-il chercher dans nos déserts, un souvenir autre pour sourire ..
V
Que dire des portes qui s'ouvrent et se ferment au gré des soupirs? C'est très beau....<br /> Bien à vous
LA COLLINE AUX CIGALES
  • Dépotoir et déposoir de mots, de pensées... Ici repose mon inspiration et mon imaginaire ; une sorte de maïeutique effrénée et dubitative et il me plait de pouvoir partager à qui veut bien.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Derniers commentaires
Archives
Newsletter
Visiteurs
Depuis la création 207 340
LA COLLINE AUX CIGALES
Publicité