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A travers l’instant immédiat passe encore un peu de lumière. Dans l’immédiat s’enfuit le présent que l’on a cru existé. Nos mémoires n’existeraient pas si le passé n’était pas l’essentiel de nos temps apprivoisés. Là, maintenant, tout de suite, ce qui s’égrène ne sait rien du volume dans lequel le vivant va mastiquer jusqu’à plus de dent.
A travers les mots le temps ne conjugue que nos sentis. L’émotion furtive et éphémère ne sait pas non plus la brisure qu’elle colporte par delà la fixité que nos sentiments confèrent volontiers à l’heure qui passe et ce qui demeure en outrepassant c’est le signifiant de la chose vécue.
L’énigme de la mort se découd dans le mystère de la vie. Et, ce que nous savons est ce que nous voulons bien croire comme fondé à la cohérence de nos ressentis.
Je respire donc je suis. J’imagine donc je crée. J’aime donc j’existe…
Que reste-t-il du monde qui n’est pas nous ?
« Mourir serait, chaque fois, là où nous parlons, ce qui retient d'affirmer, de s'affirmer, comme de nier. »
- Le pas au-delà, p. 94 -
« Ecrire, c'est ne plus mettre au futur la mort toujours déjà passée, mais accepter de la subir sans la rendre présente et sans se rendre présent à elle, savoir qu'elle a eu lieu, bien qu'elle n'ait pas été éprouvée, et la reconnaître dans l'oubli qu'elle laisse et dont les traces qui s'effacent appellent à s'excepter de l'ordre cosmique, là où le désastre rend le réel impossible et le désir indésirable. »
- L'écriture du désastre, p. 108-109 -
- Maurice BLANCHOT -