Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
LA COLLINE AUX CIGALES
15 février 2010

L’amour et la mort : deux fatalités tragiques.

Tmp00001

Ce qui unit et ce qui sépare, coupure et couture d’une même trajectoire où s’effile le temps occupé et la disgrâce de nos intentions amoureuses. Nous occupons la place de notre néant. Comme un rappel de l’absence qui nous semble être un vide que nous avons pourtant déjà habité.

Ma sœur, je ne sais pas si tu existes encore parce que je te pense. Je sais seulement que tu es gravée en moi comme une fontaine qui continue à couler. Et à laquelle je puise une tacite relation virtuelle remplie d’émotions bien présentes.

L’aliénation et l’absurde.

L’aliénation qui conduit à être son propre couperet, sa propre fau à vendanger parmi les pulsions instinctives la part de primitif réduite à une écologie mentale du bien se tenir. La morale comme toujours précipite à l’échec le sourire qui ne doit pas naître sous peine de contrarier l’idée que l’on a de soi et des autres en un milieu si ce n’est hostile du moins intraduisible à des actes et des paroles adaptés aux gants d’un monde tenu en laisse par la pensée du bien faire normatif.

L’absurde demeurant ce qui échappe à toute logique propose de délégiférer l’harmonie des préconçus qui témoignent pour nous des écarts pas toujours nommables que nous constatons entre une réalité fixe et le mouvement induit par nos difficultés à nous ressembler de ce que nous sommes faits.

Nos consciences se trouvent donc souvent en dysharmonie avec nos sentiments et il nous faut l’humilité pour parvenir à assimiler l’ordre des choses qui ne dépendent pas seulement de nous-mêmes.

Rien ne se justifie, ni d’aimer, ni de mourir. L’éternité est le mensonge de l’amour comme la mort est la seule obédience incontournable de la vie. Or l’existence n’est pas seulement l’existé. Or, la vie n’est pas seulement un exercice d’actes mouvants où les corps se prononcent comme des sentences. Nous sommes habités d’univers parallèles qui s’entrechoquent et s’entremêlent et s’interpénètrent en permanence. 

T’aimer est te dire à visage découvert combien l’écho de tes floraisons m’enivre. T’aimer est accepter de reconnaître en toi le miracle de ce que je vis comme un manque profond que jamais je ne parviendrais seul à combler.

Une voile à l’horizon n’évoque pas forcément un bateau, c’est peut-être aussi la parabole d’un paravent flottant sur un horizon qui nous est caché.

Que ne détruisons-nous pas en créant ? Aimer est créer. De la mort ne reste-t-il pas les étoiles qui continueront à éclairer nos tombeaux ? Combien de fois ai-je la sensation d’arrêter de vivre dans cette vie tortueuse et gloutonne d’aphorismes ?

Je te le dis comme je le pense, tu es morte et c’est un si peu qui t’a réduit à l’ombre que je t’enlace encore dans mes sursauts dans le noir. Une mort se bâti comme une vie : dans l’échec des compromis à vouloir fusionner.

La vie est maternelle, elle qui accompagne chemin faisant de ses baisers et de ses conseils. La mort quant à elle est paternelle qui gronde et qui aide à surmonter l’obstacle. Nous sommes les enfants d’une nuit élogieuse, où la buée a rejoint la commissure des rêves et où s’est enfanté dans le gène de l’absolu la larme et le rire que nous déversons tant bien que mal de nos peaux fines à l’immensité qui nous absorbe. Dans nos tremblements précédant l’étreinte nous avons senti l’éclair qui a dispersé nos poussières. L’amour nous conjure à l’éternité. Il dicte ce qui se renoue à l’inlassable perpétuité d’un cœur mourant et à sa lumière errante, la fin qui se jette dans le recommencement inéluctable d’un adieu qui apprend déjà à dire bonjour.

Mon ignorance peut se livrer à l’angoisse. Ta mort m’a livré prématurément au rien que je fais renaître parce que derrière toi, il y a moi encore dans le perceptible du chaud et du froid, reptile enroulé à l’idée qu’une mort sans une vie n’est qu’un excipient éphémère à la croisée des lumières et des sombres lugubres des abîmes sans support tangible. Je n’ai pourtant que faire de cet après la vie qui ne peut avoir de sens pour moi bien vivant encore. Je n’ai pourtant pas besoin de savoir ce qui se déroule dans cet évanouissement définitif. Qu’aurais-je tant à redouter d’un état où tous mes tourments se seraient dissipés, où toutes mes brûlures n’auraient plus le goût de mes cicatrices ?

Un déménagement fatal se produit dans l’amour comme dans la mort. Nous ne conservons rien de nos habits de nomade, seuls les vertiges persistent. La mort n’efface pas la vie qui la précède comme la vie continue à se nourrir de la mort d’où elle vient. Jamais à l’identique et pourtant sans cesse renouvelé. Nous sommes des colporteurs, des gens du voyage, des migrateurs dans l’ambulance des urgences. Le verbe se fait chair, le mot dans son trépas nous infiltre au-delà de nous-mêmes à la radicalité extrême des survivances des petites morts qui sommeillent en nous. Vestiges incommensurables des éternités rassemblées en un linceul que nos instincts ressuscitent comme des charités des temps oubliés très loin dans le sacrifice inséparable des enchevêtrements. 

Le sens de l’avenir se réduit à chaque jour qui passe et je m’approche et m’éloigne en même temps de ce qui semble être perçu par moi comme une durée dont la fibre se limite à mon seul destin. La vie n’a de sens que si la mort la clôture. L’amour lui file au travers des siècles sans rien ne puisse vraiment lui être fatal sinon lui-même. Le signifiant l’emportant sur le signifié, je m’exécute comme un souffle circulaire où l’air transporté termine sa course en volutes sphériques. Dans le rond de moi-même. Dans la cellule prête à fermenter. Dans le refuge de l’existence microscopique et minutieuse.

De l’unité de la pensée et de la vie. Musarder, il me plait de musarder dans ces décombres enfouis, et de flâner au bord des précipices de dissonances. Dans ce fatras de bruits incongrus, j’entends la légèreté comme un silence… un silence comme une eau claire s’égoutte à la proximité de ma chair.

Rien de ce qui s’écrit n’a la charge du vivant, le poids est ailleurs. D’un trébuchement l’habile souplesse fait des boucles et les songes deviennent ses frisettes, ses anglaises qui ondulent la chevelure des rêves. Le jeune garçon continue à désigner du doigt le futur vieillard mais le temps s’est arrêté pour se désaltérer. L’orgueil devra s’incliner et la fierté sera désuète. La chasse aux trésors de cette vie ne nous fera pas dévier d’un iota des splendeurs involontaires vers lesquelles se tendent toutes les pulsions, ni des perceptions imperceptibles de l’onde liquoreuse qui saura toujours enflammer les prémices de la jouissance. La jubilation mouchetée s’habille des combats qu’elle embrasse. Meilleur encore que le vin de mon sang, l’amour qui conduit à l’ivresse sait inonder ce que nulles terres ne savent assouvir. Tous les vents du monde soufflent sur mon jardin et mordent de mes fruits mûrs. Je cueille l’abondance mûrie et me lave de son jus.

J’ai cherché et je n’ai pas trouvé. J’ai cessé pour un temps de chercher. La plaine verdoyante accueille mes ombres endolories avant qu’elles ne fuient sur l’autre face repoussée par le souffle du jour qui éclot tel un oisillon déployant ses ailes et s’étirant des torpeurs d’un premier sommeil.

Dans une réminiscence soudaine, une gorgée de beau remonte à ma surface. Le beau et le bon s’amplifient à n’être qu’un et unique. Toute beauté me dévoile à une aptitude nouvelle. La beauté m’agrandit.

Cet autre moi-même finalement détermine ma valeur. Il dresse sans détour toutes les faces fragmentées de mes sens. L’interprétation de mes valeurs se fondent à la vie et c’est de l’existence elle-même dont il s’agit et non d’une valeur au sens hiérarchique, bien sûr. A être deux en moi-même, je m’évalue de mes perspectives. Je me résume dans cette notion d’artiste et d’interprète par lesquelles je m’explore, selon une pensée Nietzschéenne de l’unité de la pensée et de la vie. Sans plus savoir vraiment qui de la pensée où de la vie active l’autre. Je me rends compte combien penser mutile et asservi. Et cette confusion est ma fuite.

Se construire est vraisemblablement, tout à la fois, se dégénérer et s’amplifier des vides engendrés dans l’affirmative de ses oppositions.

Cette idée de descendre au plus profond de soi, au plus redoutable de l’angoisse pour y trouver une source, me plait et me séduit. C’est du vulnérable qui est en nous qu’il me semble être possible de désaltérer ma soif d’être. Ce n’est que démuni que j’entends m’étonner. Et ce n’est que la solitude de l’étonnement non partagé qui prohibe le tendre moteur de mes ferveurs à m’expatrier tout entier dans la joie qui récure l’entendement. Faut dire que j’ai toujours était un cancre à l’école de la vie.

la_pose_197kLa fêlure. Je le savais d’avance, à se soucier de soi, on aborde forcément un jour ou l’autre sa fêlure. Ce lieu précis où suintent en constance les eaux salées des refoulements de son sacré

Je pourrais me fuir dans une parfaite indifférence et n’avoir dans mon regard qu’un désert de voix. Mais cela serait faire fi de mon cœur et combien, je me sentirais plus seul encore. Il serait probablement plus doux quelquefois que cela soit ton visage qui plonge au fond de ma douleur pour que tes yeux me rendent vraisemblable aux lumières du jour. Peut-être alors trouverais-je en cette image un peu de force à anéantir mes faiblesses. On extirpe tant de puissance au cœur de la souffrance. Et puis, je me questionne sur l’effet de mes mots écrits en chandelle sur cette feuille blanche ne sachant pas vraiment qui est plus fort que l’autre, la pénombre ou la clarté.

Il est des soirs où l’on n’a plus envie d’être ailleurs, où l’on voudrait se rassembler d’une seule pièce et tirer les draps pour se recouvrir, s’envelopper de la ouate de la nuit pour se laisser mijoter comme on le fait d’un ragoût auquel on a ajouté quelques liants aromatiques, quelques saveurs particulières. Etre là tout entier, sous le doux feu d’un prolongement minuté et orchestré par la flamme elle-même.

S’aimer somme toute nous élargit. Plus l’espace de soi devient grand d’amour plus la béance se rétrécie. La fêlure devient alors une prise d’air qui s’étouffe. Ni le grondement d’anciennes cicatrices, ni la rougeur des plus récentes ne parviennent à transpirer sur l’état de grâce qu’est le répit.

Et puis, il est de ces vérités qui nous font honte de ce que nous sommes et horreur à accepter. J’emprunterais volontiers une sensibilité autre, j’étalerais volontiers l’illusion plénière de mes soubresauts à me consentir libre d’aucune attache, d’aucune retenue, pour me présenter vierge à toutes expectatives nourricières, mais j’accuse mon passé qui me violente et me terrasse. Il n’a cependant rien d’extraordinaire, chacun transportant ses charges. Je ne fais sans doute que trimbaler la mort qui me poursuit depuis longtemps. Et elle est si lourde, cette défunte lorsqu’on est vivant, qu’il me semble quelques fois vivre par défaut. Comme si ce n’était que ma pensée qui produise l’effort pour me délivrer de cette gangue mortifère, que j’en oublie mon corps devenu invisible par la léthargie qu’inoculent mes chambardements récurrents. Quelle cacophonie en moi !

Troublions supplémentaire ou complémentaire, ce corps qui ne délivre qu’une simple apparence ; que vit-il, qu’elle est sa perturbation propre ? Je me récite : mon ventre appelle comme lorsque j’étais enfant et qu’il avait faim, les muscles de ma jambe et de ma cuisse tirent pareillement aux sensations que j’éprouvais lorsque j’étais en croissance d’adolescence, ma main enfin, tapote de ses doigts en signe d’impatience… Mais l’ensemble de cette charpente osseuse crie la courbature comme celle d’un mauvais réveil où tout nous semble rouillé par l’inertie du sommeil.

Le cœur ne peut faire office de conscience et cependant, le vrai du jour lui demande l’opprobre d’une morale. Me voilà bien attaché, prisonnier de mes lianes à serrer les gouttes altières de mes compassions à me défendre. Mais à me défendre de quoi ? Mon théâtre est dans la sublimation de mon intérêt à me vivre et mes yeux ne savent voir que ce filigrane désuet que l’émotion perle sur mes gestes à chaque tentative de caresse sur la peau de mon habitacle.

Si tu étais là, mieux que de t’inventer, je libérerais sans scrupule tous les nulles part qui s’offrent à moi et qui en l’état ne s’accumulent qu’au néant. Mon désir te consentirait le ruissellement de sa source et je m’émanciperais un peu de cet envahissement qui m’inonde. Je logerais en toi ma déraison et tu porterais mon masque pour que je puisse me détester de mes apparences. Tu saurais mettre fin à mes ombres en illuminant de ta douceur la fureur et la rage que j’ai à me déchirer. Mon piétinement s’estomperait et j’avancerais, timidement d’un pas à pas un peu fébrile. Mais ce ne sont que des rodomontades excessives, et t’envier de cela m’éloignerait de toi avant même que tu fusses réelle.

Aimer est croire qu’on est attendu, et je ne suis attendu de toute façon que de moi-même. J’erre sur les fils d’eau que ma transpiration suppute de mes mirages ; or, malgré l’effort aucun oasis n’est là. Trop de répugnances à l’illettrisme de mon cœur gargouillent dans ma raison, je le sais. Dans cette chasse à cœur, il faudrait lâcher les chiens pour qu’ils courent et traquent les émotions. Qu’ils mettent à jour les perceptions silencieuses et cachées dans les fourrés de l’abandon, qu’ils dérangent la nature somnolente du renoncement et fassent s’envoler d’une seule brassée tous les frissons tapis dans l’antre des marécages. Qu’ils réveillent la parole que j’invente pour que je puisse me hisser aux faîtes de mes palabres pour en traduire ce que cela changerait de moi.

La fêlure même bâillonnée persiste de ses jacassements, je me souviens qu’elle me disait : « je n’aime pas la chasse ! ».

A poursuivre ainsi, je pressens que quelque chose se substitut à mon souhait de consolation et les lèvres de mon cœur retiennent encore le langage du provisoire avenir de mon amour. Chaque nouvel indice de ma perte, chaque menace inaugure un salut. Et je ne me construis point dans la souffrance mais je glisse d’une souffrance à une autre achoppant ma tristesse sur le coin d’un sourire. Je viens à peine de le comprendre rien ne se limoge, tout se transforme perpétuellement.

Résister à la tentation de l’empathie pour approcher au plus fin ce que l’on est. A l’intérieur de ma sphère, l’ancrage au vécu, au passé, me laisse perplexe, et je crois que l’abandon est la seule voix sur laquelle un homme vivant puisse marcher.

Il faut s’indiscipliner de sa discipline à s’épurer, savoir être de l’interruption, dans le silence de la signification du temps à vivre. Ce qui s’achève ne laisse pas libre court à ce qui se vit. Il m’est urgent de me débarrasser de ce qui existe pour entrevoir sans artifices les fragments de l’invisible qui me tendent les bras.

S’expérimenter comme ici, à cette porte, et puiser dans les dédales logorrhéiques les non sens des référentiels à se concevoir. L’aporie est un embarras indiscutable qui conduit merveilleusement à l’inusité.

De l’inachevé j’habite la part crédule et je m’augmente bonhomme du mépris de la vérité comme d’autres font reposer leur santé morale sur la raison. Je complote avec l’intarissable aux ruisseaux de l’errance et m’adonne volontiers au dessèchement des mers qui rugissent dans mes lavabos à décantation.

Le principe de se raconter pour s’entrevoir chancelle et je chute sur moi-même comme une pierre au fond d’un puit. Je vous écrirais d’en bas si la lumière m’y aide. En ce lieu, l’avorton est la seule grandeur qui sublime.

Ainsi la tête entre les mains du solide quotidien

Le souffle des aspirations est le bruissement

De la ronde intention d’une humeur qui s’éteint 

Et s’enfuit aux creux des mains tous les tourments

A se contenter de vivre là où balbutie l’éphémère

La contingence s’ignore de ses attachements

Et je fricote d’émanations invisibles jachères

Que le temps a pourvu de la tombe du présent

Jusqu’au dernier jour l’assemblage tient rigueur

Pour que les larmes éclairent le détachement

Où le destin s’abandonne aux baisers des peurs

Et soulage le silence de ses faux engagements.

Combien de courbures pour invoquer l’imprononçable…

Chaque jour est le poème d’un autre jour.

Impossible. Il faudra que la vie s’arme de patiente avant que ne vienne la mort de l’oubli. L’heure est encore vive de ce qu’elle ne sait pas. Les aiguilles chipotent l’horloge de ses minutes à se défaire et le jour pose ses jalons de nuit dans la perspective d’un sommeil qui n’en finirait pas de s’épuiser. L’humidité est due au climat et ne peut sécher. L’âme embuée égoutte sa moiteur à l’ombre du temps humain. L’endurance se frottaille à l’exaspération dans un cliquetis qui transpire et c’est le regard perlé d’émotions que j’interpelle le souffle des contritions devenues singulières. Les attritions jubilent de leurs fentes qui laissent s’écouler les sèves gorgées des adductions fières et prétentieuses.

Il faudra que la joie vienne comme les coquelicots colorent le vert des champs du printemps. Sans odeur et aussi éphémère qu’une étoile filante, le beau laisse sa trace dans les mémoires ouvertes. Et si nous allions roussir au soleil tranquille de nos vies au repos… ? Les sillons marquent le dérisoire des superflus qui se superposent aux lignes déjà tracées. L’amas protège de son couvercle l’intense qui voudrait sortir. Dessous, c’est dedans. Et penser à toi ne remplit pas mes grimaces. Le virtuel ride ma peau concrètement, je plisse de l’envie de sentir ta présence toute proche, à l’encornure de mes hésitations. Cet appel, je le sais, troue l’itinéraire qui aurait pu me conduire jusqu’à toi. Comme si cette invitation parjurait l’attrait et lynchait l’apostrophe de notre praticable. A une virgule prés, nous aurions pu, je le sais. Pique ta tête dans mon cœur, le plausible pique un roupillon.

Le vivant s’augmente naturellement par la beauté du sentiment qui le pénètre et rempli son cœur. Quelque chose de plus grand que nous sommes, nous amplifie et nous offre de nous accomplir d’une part de juste qui nous subjugue.

Cette faculté qu’ont les bandes d’oiseaux à s’envoler à l’unisson dans une même direction, me plait. J’y ressens une union viscérale avec ce monde que je découvre chaque jour davantage. La nuit recouvre la nuit et le jour picore des grains de lumière au hasard de sa course. Me voilà bien épris tout à coup des ferveurs singulières que mon quotidien effleure dans une discontinuité régulière.

La vie se borne si souvent à ce que j’en vois. L’idée d’une peau qui se noie dans une peau pour s’étendre d’une seule toile m’émeut. Une coordination panréaliste de l’univers où chaque chose à sa place supposant qu’il existe une place pour chacun d’entre-nous, me laisse pantois et admiratif.

Je voudrais ouvrir mes oreilles et fermer les yeux pour entrevoir la délectation de cette unique saveur. Mon esprit chaotique bourlingue d’un réel émacié à un rêve aérien et magique sans en avoir vraiment conscience. Mal huilée, ma porte grince. Le vrai se soucie de ce qui est, et me voilà décalé par l’idée que je m’en fait. Il ne se peut en ce monde jamais y avoir une perception plus décousue d’avec le monde lui-même.

J’œuvre de ce que je suis, nul doute. Je ne m’accoste jamais aussi bien que lorsque je m’époumone à me deviner de ce qui se tait en moi, de ce qui se cache aux interstices de mes tribulations. La détresse logée dans l’obstacle à m’émanciper, je maraude de mes inconvénients à me traverser, me parcourir, à me chaparder de l’irrationnel de mes certitudes acculées à leurs désarrois.

Je ne connais rien de l’illusion dont je suis fait et j’ignore totalement ce vers quoi me pousse la négation de mes élans à être.

On se sacrifie volontiers au plaisir, mais quel plaisir peut-on éprouver à se torde et à s’essorer de la multitudes de consentis que l’on s’accorde ? Ce que je vois n’est-ce dont point ce dont ma tête est pleine ? Je suis plein de moi.

Il arrive que mes larmes soient cet acide qui troue et déprave la chose entendue. Sur l’éclaboussure des larmes perlent l’environnement de toute part. Des images trouées tapissent l’alentour et partout suinte de l’incommensurable liqueur du temps.

Dehors la lune connaît la misère des nuits sans opales. Et je l’entends d’ici cloaquer de ses crevasses à mordre l’échine des vides.

Mes yeux aux paupières durcies et mon cœur délavé savent trouver communément le sommeil des pierres. Un roc s’endort d’un bloc et je suis dans la seule expansion où je converse avec moi-même. Dans ce gouffre où tous les murs sont du soufre prêt à s’enflammer. Dans ce trou où la mer dans son ressac emporte de ses vagues plus qu’elle n’apporte, je me liquéfie et mes gouttes se mélangent aux brassées qui s’évadent vers un lointain ignoré. Je voudrais m’unir aux bruits du vent et colporter avec lui toute la dérision qu’il y a à se refouler de ce que l’on est. Et dans la brassée de feuilles endormies sur le sol, je voudrais m’évanouir d’un soulèvement comme de la délivrance des larmes que l’on laisse derrière soi.

Il n’a pas de parole pour décrire, il y a juste des mots pour peindre un état. Et de mon pinceau je dessine les couleurs et peins la frustre étincelle de mes désespérances.

Ce que je déserte L_OEIL_du_MIROIR_REFLETSme rempli. La dissidence m’extasie. Etre là où je ne devrais être me rassure. Je me souviens bien mieux de ce que je m’oublie. Le nul part est une terre d’abondance. La frivolité un éther des plus suave. Se perdre de sa raison m’enchante tant je peux me faufiler immatériellement dans une jactance boudinée d’incroyables.

Le silence est une lumière qui couvre de sa clarté l’immobile qui serpente en moi avec la dextérité des eaux vivantes qui trouvent toujours un chemin pour s’écouler. Le songe de ma chair tague mes paradoxes et explore mes turpitudes comme le ferait un cerf-volant mue par le souffle d’une existence transite par l’effroi de ses circonvolutions à grimer le ciel de mots imprononçables.

Dans l’étuve de tes yeux, je vois l’enfermement de mes syllabes et mon cœur me semble un télescope palpeur d’extérieurs. Je m’imbibe comme une éponge du démembrement de cette obstination à concevoir une parole désarmée équivalente à une brume blanchie où l’exil parait une inadvertance.

Rien n’est plus stupide que se pencher sur le vide sans tomber. Si tu as connu le délice de la rumeur du cœur qui s’inscrit sur tes yeux, tu devrais te laisser choir. Tomber n’est pas mourir. Ta peur nourrit tes colères à te tromper. N’estime pas la chute avant de l’avoir consumer. Regarde l’abîme, elle te sourit.

Publicité
Commentaires
V
Penser sa blessure non comme un asservissemnt mais comme une liberté à concevoir la clarté.<br /> Les mots sont les petites veilleuses de nos fêlures,dans le silence des émotions mutilées.<br /> Merci B pour ces très belles lignes évocatrices d'émotions authentiques et partagées. <br /> "Il faudra que la vie s’arme de patience avant que ne vienne la mort de l’oubli."
LA COLLINE AUX CIGALES
  • Dépotoir et déposoir de mots, de pensées... Ici repose mon inspiration et mon imaginaire ; une sorte de maïeutique effrénée et dubitative et il me plait de pouvoir partager à qui veut bien.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Derniers commentaires
Archives
Newsletter
Visiteurs
Depuis la création 207 338
LA COLLINE AUX CIGALES
Publicité