P59 - Juste toi.
Du cousu main, cette broderie textuelle
Tracée à main levé, à libre tendance
Un essai de choix sans choix, sans voix
Juste toi
Mon cœur sur une civière
De retour de croisade
Ne voulant plus croiser rie
Juste s’étendre, juste s’entendre
Ma liberté aussi étroite que tes lèvres
A me dire
A me susurrer
Du bout des franges d’émois
Après la bataille d’amour
Une cigarette fume seule
Sur le bout du lit
Et tes yeux piqués
Sautent au plafond
Pour nous voir de plus haut que nous sommes
Nul brancardier à l’horizon
Seulement l’étoffe de tes conjurations
Pourvu que nous ne rêvions pas
Pourvu que le réel soit corrosion
Et que nous sentions nos vies se dissoudre
Au moins un peu
Au moins assez
Pour croire à la douceur des draps
Pour s’acoquiner de nos peaux
Pour rire d’un rire d’éclat cristallin
Et que nos mains soient des mots
Qui traversent la chair
Que nos rêves succombent
A l’éternité du rire
Que nos consciences adulent
L’amour perche l’impossible
Sur des rimes en cascades
Ce qui ne pouvait pas être
Prend la forme de tes formes
Ce qui était inatteignable
S’ajourne des ombres vaporeuses
De l’hésitation résolue à s’affirmer
Vainqueur d’avoir perdu
Le devenir n’a pas de commencement
Ou bien il est si lointain
Que nul n’en sait plus l’origine
Il n’y a qu’un début
Et il repose sous le masque sombre
Du désir qui pousse
comme un aveu
Du cousu d’ombre, ce peau à peau
Où s’endorment les grelots de l’enfance
Au sommeil des réconciliations
Au sommeil des sutures et des boucles
Que le cœur pique comme une aiguille
Pour recoudre les abimes
Pour que les précipices se rejoignent
D’un seul tenant, d’une seule toile
Où s’habillent nos émotions créatrices
Juste toi
Et le monde palpite à nouveau.