B008 -
La vie est un drame merveilleux. Une sauvegarde du temps où plient les mémoires. Jadis lorsque j’allais à la course des heures, le regard s’embrumait par la vitesse et le nombre de choses à voir. Aujourd’hui, je ne vois plus guère et la distance qui me sépare de la mort est toujours la même : l’instant. Au génie des jours s’ajoute l’incapacité de les coudre et leurs reliques se chiffonnent dans les plis des souvenirs. Je me souviens. Je me rappelle aux mansardes de l’enfance combien la pierre me semblait haute et immuable, le mur infranchissable. Et durant les années qui s’égrènent comme de simples buvards d’émotions, la pierre vit de son côté et l’homme de l’autre. Ne s’interférant que pour brasser le vent des tempêtes où pour s’amonceler à l’annonce de probables défaites. Nos cailloux ne connaissent que la lourdeur de nos effrois et la pierre résiste même au soleil tropical des jours de feu. La vie et la pierre se fréquentent aux bosses de nos illusions et nous sommes sans doute le leurre des temples que nous bâtissons, des rêves que nous franchissons comme des outres vidées leur contenu afin que le poids nous soit moins insupportable et plus souple notre marche. Et vivre demeure la meilleure des pires choses à faire.