T0623 - Dans le vide.
Je ne suis à la vie qu’une trame incurvée aux sillons d’apocalypses. Je suis dans l’après des heures entières, héritier de la coupure des morts qui tranche la vie en copeaux pour en répandre les miettes de sciures vomies. Séparé de moi à l’épreuve des jours qui désossent jusqu’à la respiration, j’enjambe le temps désincarné aux lueurs de moi-même. Des réfutations engendrées du passé, ne reste qu’un ciment de perlimpinpin où je patauge par défaut. Et les yeux dans mes yeux l’absence n’a pour lumière que mes cendres refroidies. La charité s’est fendue dans l’oubli qui charrie avec lui l’humanité des humanités à se dire. J’habite les rives de mes sources d’une rivière qui s’est tarie. J’embrasse chaque jour la mort réfugiée dans mon ventre où grelottent les désirs inassouvis que la mémoire bave aux creux de mes intimités. Le souffle des transparences saisi la manche de mon cœur pour l’accompagner au cercueil des fractures, là où baignent encore quelques braises de délires, des fanges inappropriés aux folies qui me transpirent à l’écriture des lettres de mes fantasmes.
Derrière l’ombre de chaque mot pleuvent en cadence les déchirures que le noir fait taire. L’insurrection est fragile comme la goutte d’un regret sans amertume et c’est dans la solitude des masques aux nombreuses sutures que se terre la pudeur de se reconnaître de ce que l’on a été. La pensée foudroyée à l’endroit même de ses rixes, offre à la raison le spectacle de ses flammes. S’embrasse la mémoire du mégot des peurs aux bouffées blanches qui s’évadent de ce qui me retient comme pour me défaire de cette brisure à laquelle la vie désormais me lie.
C’est dans le silence que j’apprends à crier l’infirmité corrosive. C’est dans l’espace clos de moi-même où se recueille mon chagrin de peau que j’entends les plus fortes secousses. Bien des musiques sont tombées sans que je ne sache les redresser, et cependant mon silence est gonflé du vacarme de mes insomnies. Funambule de mes désastres, je grimpe à la ligne de la mort pour chercher à y renaître de mes compulsions instinctives dont l’imaginaire est la liane d’accès. Et si certains meurent à s’inventer, je m’érige d’une mort salutaire, le berceau de mes plus puissantes créations. Je suis là d’emblée appartenant à ce que je n’ai plus. Ma jambe invisible donne le pas. Je ne suis tout entier qu’un membre fantôme où la plaie est difforme.