Paul VALERY - Entretien à Budapest -
« Je ne sais mieux le définir que par cette modification singulière que l’homme éprouve au contact de l’homme — quand il le rencontre et qu’il ressent la naissance de la compréhension réciproque, quand il perçoit le connu dans un inconnu, le semblable dans le différent et le même dans l’autre — et qu’il entrevoit, en dépit des apparences, de la race, des coutumes, du langage et même des antagonismes déclarés, cette évidence mystérieuse de l’identité intime de nos êtres. Nous ne différons, après tout, que par des accidents et des hasards [...]. Nous pouvons après tout oublier notre nom, notre histoire personnelle. Il demeure toujours ce Moi central qui [...] peut répondre à une infinité de vies toutes diverses. Tous les hommes possibles n’ont qu’un Moi et je ne puis concevoir deux manières d’être soi-même. Et nous le voyons bien quand la joie, la douleur, les états extrêmes ou les moments sublimes nous simplifient. Nous faisons alors de l’humanisme pur. »