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Je te reconnais de tes silences aveugles à crier l’exil dont ta chair se plaint à souffrir la lourdeur séculaire de ta terre trop grossière. Tes pas sont des empreintes pénétrantes et l’ombre ne sait plus de quel côté se loger. Ton souffle excommunie les errances des bateliers sans voilage prônant davantage les vertus de l’ancre d’amarrage que les voiles qui emportent vers des horizons nouveaux, aussi neufs que l’intrépide qui boue dedans, à l’intérieur des peaux où le sel se dépose.
Je te reconnais à l’embrassure de tes promesses sans aveux que le temps érige d’un peu à peu dans l’allégorie d’un infini en tourbillon. La plaie devient une naissance elle invente et ouvre le grain qu’aucun pied n’a encore osé fouler. Le grain s’évente de tes bouffées où germe le blé de tes rêves à contenir l’émotion dans les draps bleu de la mer.
Je te reconnais même lorsqu’en haut de ton mât de cocagne tu défriches l’espérance comme une nouvelle terre et où tu imagines que poser les cœurs serait rompre à l’amertume des jours cisaillés par le grain que la pluie fouette de ses ressacs. C’est un infini que tu longes dans le noir comme un secret et j’entends dans le creux de tes noirs mystères s’éponger les cris d’abstinence aux éclats de tes rires. Tu es de ces appartenances que la vie renvoie inlassablement comme des vagues.
Je te reconnais de tes murmures à édicter l’éphémère qui décline sur l’heure fière que les doigts de la joie caresse comme les cordes d’une guitare à serments. Et aux lèvres de ton enfance je vois le sourire d’un devenir qui s’éclaire de tes feux à brûler les jours comme brûle le soleil lorsqu’il s’unifie à la mer. Pareillement nous désirons de la dérive et nos flots ondulent du tendre consenti que l’amour préserve.