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LA COLLINE AUX CIGALES
1 août 2008

0581 – ô mon cœur !

NU07

Sous le dépliage de paroles apaisantes, le cœur dissipe son inquiétude à se mouvoir. Toujours en quête de se convaincre, son activité se régule au gré de la raison qui lui conjure de ne pas sombrer dans un quelconque excès. Et cependant, je ne saurais dire si l’excès en question est dans mon regard où dans celui de l’autre et si cet autre regard n’est pas justement celui qui m’emporte à une déraison évidente.

Mon cœur, il parle. Il me parle. Et sa présence me confie la part de rassurage nécessaire à affronter la turbulence. Ce cœur qui n’est pas seulement un organe aux fonctions biologiques, c’est aussi mon ami, mon confident, mon dedans intime. De lui il m’est possible de vivre tous les cauchemars, toutes les avanies comme toutes les truculences et les jubilations. Il prend généralement une emprise féroce sur mes capacités de réflexion dés lors qu’il s’enthousiasme. Il me dirige bien souvent de sa vérité. Et je ne sais même pas lui reprocher. Même lorsqu’il m’érecte à sortir de moi pour m’élancer vers une émotion branlante, je ne fais qu’assouvir ses propres emphases. Pauvre de ma non maîtrise et de mes incapacités à mesurer la démesure, je m’enrichis néanmoins au travers de ses éclosions écarlates. Et puis de toute façon, comment pourrais-je m’élancer sans m’éloigner de moi-même dans un reflet qui me porte et me transcende ?

Le cœur est cet ami fidèle qui me provoque et qui me laisse si souvent dépourvu. Il est l’enfant aveugle qui me fait être au-delà de mon espace clos et privé. C’est l’ascenseur qui me porte jusqu’aux nuages blancs de l’infini. Je ne connais rien de l’infini. Qu’il se dirige vers mon extérieur où qu’il m’introspecte de mes caves, il est tout autant en phase avec l’infini. Je ne sais cerner cet espace qui n’en fini pas, qui n’en termine jamais. Je suis limité à découvrir au gré de ses balades, aux rythmes de ses envolées, là où il m’amène, je vais. De lui je ne fais que réagir. Même lorsqu’il me semble etre en symbiose avec mon esprit, je ne fais que répondre à ses altercations, ses demandes, ses tribulations.

Il est le grand acteur de toutes mes désespérances et offre à mes tristesses de se métamorphoser en joies.

Lui qui sait si bien me projeter hors de moi, hors du temps, hors de toute raison, il n’a de cesse que de vouloir m’émanciper des fourberies flatteuses de mon ego et m’y reconduit pourtant inévitablement. De ce pur moi-même qu’il me plait de penser ouaté et immaculé, je ne sais vraiment ce qui est véritablement sain et viable.

Connaît-on jamais son cœur ? … Et j’entends une petite voix intérieure qui me dit à voix basse « mais, tu sais bien que je suis ton allié le plus coquin et le plus rusé, mais qu’il ne faut pas te démettre de moi, sans quoi tu perdrais toute saveur à te vivre… ».

NU_20001Mon cœur pense à ma place et je ne sais si je lui pardonnerais d’ici longtemps, d’avoir pris pour moi des décisions qui m’ont porté au paroxysme de la douleur.

Oui, toi mon cœur, pitre mécréant, qui m’a non tari d’amour mais carabossé de toutes les peines, terrassé de toutes les souffrances les plus insupportables, dois-je insister à me vivre de toi ?

Mais combien il serait terrifiant de vivre sans toi. Je n’ose même pas y songer, j’ai bien trop peur de me référer et de me livrer uniquement, exclusivement à ma raison. Que serait une conscience esseulée si elle n’avait pas à se pratiquer de l’amour ? Un mariage arrangé ? Un arrangement … Le cœur, un arrangement ? Foi de vie, il ne se peut !

Il est si doux de pouvoir s’hypothèser aimé/aimant. Cornes de bic !

Que n’ai-je donc senti de mes petites jalousies si ce n’est l’affirmation de ce que je suis. Même si quelquefois, il m’a semblé n’être qu’un reliquat et non un postulat, j’ai tout de même vécu de cela. La mémoire du cœur n’est-elle point la seule qui pleure de ce dont elle se souvient ?

Peut-être que de l’Amour nous ne connaissons que le sentiment qu’il traduit et non l’insondable enivrement de l’amour lui-même. Peut-être sommes-nous à nous vivre au travers du sentiment que par son exclamation. Mais que serions-nous sans lui pour autant ?NU_20007

Livrés à nos seules prérogatives de séduction et de copulation instinctive, l’amour serait sédentaire de lui-même. Alors qu’ainsi, il nous déracine de toutes limites, de toutes traces sociales statiques ou avilissantes et nous offre la plus merveilleuse des « porte-ouverte » à la folie de nos conceptions immatérielles. Il nous accuse de nos splendeurs involontaires. Quel extraordinaire non sens ! L’amour est ma bibliothèque vivante, où chaque perception trouve sa place. Sans lui, toute expérience m’est inutile.

Il est aussi le chantre de mes faiblesses, l’acquiescement incontrôlé de mes prolongements à me peindre aux couleurs qui me chantent. Mes faiblesses par lui, avant que de n’être des incapacités à être, son d’abord mes plus sûres douceurs. Heureusement l’amour n’est pas souvent lucide. En ce sens en amour la lucidité est une rigidité qui laque nos souplesses à exister. Etre lucide est somme toute bon, à condition de s’en désolidariser très vite, de s’en décalquer. Dans l’amour, il ne peut y avoir de place pour l’éclairage obsessionnel de la réflexion figée.

L’amour intermédiaire comme une passerelle de ce que l’on ressent de soi en soi, ou l’amour lien tel une coordination brevetée de l’union métaphysique, tantôt l’un, tantôt l’autre mais trop vivant pour rester en place. L’amour bouscule. La bousculade de la trépignerie impatiente ou celle de pérégrinations incoercibles. L’Amour invente et s’invente à chaque moment, il est une surprise permanente. Le définir serait le revêtir d’un manteau trop grand, ou le contracter dans un cadre trop réduit. Il n’a nulle place, il est la place de l’imaginaire vécu. Le rêve n’est que son substitut, la réalité que sa clarté.

On s’échappe volontiers de ce qui nous semble acquis comme si nous n’étions au fond que des chasseurs de sensations. Comme si ce qui nous était promis nous résumait sans aucune autre alternative et que la fierté de la proie prise dans nos pièges à émotions conjoint àNu_en_dentelles_1_detail l’étouffement d’un sans issu, nous autorisait à une suffisance bonhomme. A croire que l’on ne s’aime que de nos caprices et de nos horreurs pour mieux nous craindre nous-même et nous ôter toute idée d’appartenance, de ressemblance, de similitudes avec les autres.

L’attache rend prisonnier, l’Amour devrait rendre libre. Le dévouement doit rejoindre notre détermination et vice-versa si nous ne voulons point sombrer sous les trombes des inepties à nous accabler de responsabilités qui ne seraient que les mensonges de nos pressentiments à nous confondre comme d’autres se grattent là où chatouille le grotesque.

Et si l’Amour était répit des peines…l’appréhension du grave et des morsures de la vie aurait son jardin. Et sans doute y serais-tu la plus belle des fleurs.

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