0580 - De l’unité de la pensée et de la vie.
Musarder, il me plait de musarder dans ces décombres enfouis, et de flâner au bord des précipices de dissonances. Dans ce fatras de bruits incongrus, j’entends la légèreté comme un silence… un silence comme une eau claire s’égoutte à la proximité de ma chair.
Rien de ce qui s’écrit n’a la charge du vivant, le poids est ailleurs. D’un trébuchement l’habile souplesse fait des boucles et les songes deviennent ses frisettes, ses anglaises qui ondulent la chevelure des rêves. Le jeune garçon continue à désigner du doigt le futur vieillard mais le temps s’est arrêté pour se désaltérer. L’orgueil devra s’incliner et la fierté sera désuète. La chasse aux trésors de cette vie ne nous fera pas dévier d’un iota des splendeurs involontaires vers lesquelles se tendent toutes les pulsions, ni des perceptions imperceptibles de l’onde liquoreuse qui saura toujours enflammer les prémices de la jouissance. La jubilation mouchetée s’habille des combats qu’elle embrasse. Meilleur encore que le vin de mon sang, l’amour qui conduit à l’ivresse sait inonder ce que nulles terres ne savent assouvir. Tous les vents du monde soufflent sur mon jardin et mordent de mes fruits mûrs. Je cueille l’abondance mûrie et me lave de son jus.
J’ai cherché et je n’ai pas trouvé. J’ai cessé pour un temps de chercher. La plaine verdoyante accueille mes ombres endolories avant qu’elles ne fuient sur l’autre face repoussée par le souffle du jour qui éclos tel un oisillon déployant ses ailes et s’étirant des torpeurs d’un premier sommeil.
Dans une réminiscence soudaine, une gorgée de beau remonte à ma surface. Le beau et le bon s’amplifient à n’être qu’un et unique. Toute beauté me dévoile à une aptitude nouvelle. La beauté m’agrandit.
Cet autre moi-même finalement détermine ma valeur. Il dresse sans détour toutes les faces fragmentées de mes sens. L’interprétation de mes valeurs se fondent à la vie et c’est de l’existence elle-même dont il s’agit et non d’une valeur au sens hiérarchique, bien sûr. A être deux en moi-même, je m’évalue de mes perspectives. Je me résume dans cette notion d’artiste et d’interprète par lesquelles je m’explore, selon une pensée Nietzschéenne de l’unité de la pensée et de la vie. Sans plus savoir vraiment qui de la pensée où de la vie active l’autre. Je me rends compte combien penser mutile et asservi. Et cette confusion est ma fuite.
Se construire est vraisemblablement, tout à la fois, se dégénérer et s’amplifier des vides engendrés dans l’affirmative de ses oppositions.
Cette idée de descendre au plus profond de soi, au plus redoutable de l’angoisse pour y trouver une source, me plait et me séduit. C’est du vulnérable qui est en nous qu’il me semble être possible de désaltérer ma soif d’être. Ce n’est que démuni que j’entends m’étonner. Et ce n’est que la solitude de l’étonnement non partagée qui prohibe le tendre moteur de mes ferveurs à m’expatrier tout entier dans la joie qui récure l’entendement. Faut dire que j’ai toujours était un cancre à l’école de la vie.