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LA COLLINE AUX CIGALES
3 avril 2013

L’illisible est corrosif.

nymphe_au_bord_de_mer

Nous sommes brûlés, calcinés comme des étendues de terre offertes à la jachère pour renouveler leur fertilité. Mais parce qu’ici tout a brûlé, tout brûle encore. Et nos voix sont vidées d’histoires, nos peaux vidées de l’effleurement des jours qui tombent, nos ventres vidangés comme des puits en plein désert. Nos cœurs demeurent seuls, ils s’enflamment des sueurs de toutes nos prières. Ils convertissent la flamme et le feu en un cri d’innocence indescriptible.

Voici nos mains et nos visages où l’ombre secrète une lueur. Dans l’espace fouillé, il y a la précision de l’absence, le rocher invisible, le souffle d’une poésie suturant la plaie incurable qui loge la parole. Nous voilà résumés à de l’attente sur un talus où vieillit la lumière. Comme elle, blanche défigurée, nos vies sont dans l’écart de l’ombre.

La fluidité de l’instinct repose sur une terre brûlée. Un lieu dépourvu de discours, un lieu de traditions vivantes. En soi, la mort grimpe petit à petit comme un chiendent exubérant. Brève secousse du corps resté derrière la matière. J’entends l’extrême patience de l’air qui siffle dans l’étroit chemin de nos veines. Les sens plongés dans l’arbitraire d’une pensée fugace, puis le déchirement de l’ordinaire recherchant un ordre dans l’affreuse éclaboussure du chaos. La migration du mot vers le cœur est lente. Elle nécessite l’invasion prolongée du vide qui résiste dans notre cathédrale d’amour.

Tout se tait. Jeux terribles des besoins, jeux mortels d’illusions contrefaites. L’illisible est corrosif. La parole s’écaille et le filtre de l’étonnement s’échoue dans une flamme.

Puis, la parole s’ajoute au monde. Charrue millénaire de la solitude, oubliant ce qui la précède. Il y a trop d’étages à cet édifice, trop de portes à ouvrir. Alors, je saute par la fenêtre. Je suis à l’extérieur de l’acte qui s’inscrit dans la silhouette du porteur de souffle.

Cette aventure du mot qui cogite dans l’élancement, je l’écarte du descriptif intérieur. Dedans, ce qui retentit comme le clac d’une mâchoire, c’est le tissu du silence qui se guérit. Les mots sont des oiseaux avec des graines dans le bec. Nous sommes seulement de l'espoir jeté sur un talus de vide. Nous marchons encore dans le corps vitreux embrasé par les gerbes du vent.

Ta mort est une pudeur qui sent la rose fanée. J’ai les doigts collés sur ta joue. Chuchotements d’odeurs au fond des années, mes souvenirs soulèvent ton regard. Une hirondelle s’envole. Il est l’heure de dormir. Ta faux est mon horloge. L’heure me découpe comme du beurre. Je glisse d’ombre en ombre. Mes mains s’allongent comme des rames. Je t’accoste comme une île perdue. Je n’ai rien d’autre qu’une fine larme pour creuser ton sable. Le silence se dresse comme une poulie par laquelle monte et descend mon cœur. Je suis venu te dire le lierre qui pousse dans mon jardin. Et, j’ai rencontré le pissenlit qui se hisse derrière la haie où nos âmes se parlent comme des oiseaux migrateurs en partance vers des pays chauds. 

 

 

- Bruno Odile -Tous droits réservés ©

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