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LA COLLINE AUX CIGALES
4 août 2012

Le mot cet autre moi. (7)

8eab3ee0S’il existe des rêveries vaines, l’imaginaire ne l’est pas. C’est même le Creusot insaturable de nos alchimies les plus performantes. Lieu non déterminé par les regards des autres, lieu d'idéal où naviguent nos insuffisances, lieu empapaouté des tribulations du monde, et cependant, le seul endroit où nos misères peuvent encore nous émerveiller. Nos cœurs blessés savent la nocivité des désirs excessifs. Mais, ils comprennent aussi le feuillage humain qui remue le jour, la lumière est humaine.

Mais, il faut laisser dire et ne pas crapahuter à l’intérieur des fosses où ne pénètre plus que l’exode de nous-mêmes. Je préfère occuper le songe comme une fiction où se prolonge la conscience qui ne se dispute plus avec le réel. Et puis, laisser dire le manque, car c’est dans l’accomplissement de cette forme indiscernable et virtuelle qu’il m’arrive de dessiner les plus beaux souffles, les plus étonnantes spirales, les plus expressives figures gribouillées. J’imagine librement. Personne ne sait rien de l’air qui chavire, tournoie et s’épuise en lui-même. Personne n’a de regard suffisamment appointé pour se prémunir du désastre que le néant suggère. L’engouement est malicieux. S’enticher de toi m’oblige à demeurer attentif à l’enfance partagée qui se détache de moi. Je suis étendu sur la pierre plate de la meule. Les olives racontent leur courage pour aller jusqu’au moulin. Les mains enfoncées dans la tapenade, je fouille cette purée odorante. L’air se sert de mes yeux pour voir. Et je chavire et je tournoie à mon tour.

Laisser dire. Il faut que tout s’amoncelle sur le même tas : les gravillons, les noyaux, la sueur des bouffées de soleil, la jouissance accouchée sous la meule. L’huile s’accouple aux mirages. Je glisse et me perds. Une simple olive a raison de moi. Les oiseaux sont muets. J’habite le moulin de mes fantasmes.

Il aurait fallu pouvoir être là, juste là, avec le mot dont la seule proximité est le bonheur d’une jeune pousse grimpant dans la pénombre de la forêt. Avec quelques rêves en bandoulière. Avec des silhouettes découpées dans la soif qui s’incrusteraient aux reflets de nos brillances pas encore saturées. Comme une coupe de silence, dans la traduction des solfèges s’échappant de la main qui la tient. Avec quelques sourires dans la besace où les étourneaux enfournent des cris à crever les nuages. Comme un chant de neige fraîche, frémissant dans un bain où mijote la joie irréductible, le meilleur qui farcit la panse. Comme une pluie de plumes recouvrant les quelques grimaces restées dans le sac, dans le gibet à roublardises des transparences joueuses. Aux creux des flagrances en fuseaux où s’inscrit l’heure dans l’ombre d’un ricochet d’aiguilles. L’amour qui s’enlace dans la griserie des rondes sans fin de l’éternité rêvées par les hommes. Dans le buisson des songes sans langue, la poussière de feu sous les paupières du temps où respire la ride fluette derrière l’invisible.

Je serais comme la suie qui recouvre la mine. Je serais noyé dans les cristaux de l’espoir. Et, tu me féconderas comme une abeille. Dans la fontaine de tes eaux claires se rince le grésillement qui m’accompagne. A l’entaille des mots qui se retirent, je me réinvente dans la pierre ruisselante où bavent les mousses vertes pareilles à une larme jumelle.

 

 

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