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LA COLLINE AUX CIGALES
5 mai 2012

On ne pourra plus jamais reculer.

20_3l8w7La solitude de la mort rend le mot léger. Une source lointaine s’étourdie dans une cascade de fumée. Je danse avec les bâtons de la nuit. Des heures creuses s’empilent sur des bougeoirs et la cire s’écoule pour épouser tes formes. Une lumière rafle le chaos sans le griffer. Quelques bruits insipides défilent sur l’horizon. La vie effleure des chemins vierges. Le vide m’atteste sa brisure et me promet l’amplitude de sa déliquescence. Sur le long tissu de poudre bleue et noire, des brindilles d’amour tombent comme des fruits pourrissants.

Tu pars et tu reviens, les ombres se croisent et se multiplient. Un rêve doux cherche le sommeil au fond des yeux que tu n’as plus. Tout est inachevé. Même le feu. Des copeaux d’air s’enflamment derrière la lumière qui s’échappe de la bouche du volcan. Ils se figent à l’intérieur de la roche dure où est prisonnière la voix démantelée. C’est dans les ruines du bruit des ronces chaudes que j’entends encore un peu tout ton chagrin.

Quelques mouettes perdues posent leurs pattes sur l’encre sèche. Je suis seul sur la glissière d’un qui-vive perpétuel. Je ne suis pas mort dans ce noir peuplé d’énergie anonyme. J’habite la poche crevée où s’enlacent les herbes que personne n’a cueilli. Des mots inconnus s’entassent sur les pétales de l’abîme. Je m’enfonce doucement, la tête dans la boue et le cœur sur le dessus de la flamme. Je le sais, des merles se sont attendris sur l’espace qui m’échappe. Une fraîcheur fane sur l’impitoyable jet d’eau où se réparent des flèches venimeuses.

Nous reviendrons sur la pente où nos mains ont glissées. Nous chercherons le point d’appui que nous n’avions pas vu, le creux dans la pierre où notre pied a cédé. Il y a toujours un retour, un moment accordé pour recommencer le chemin déjà parcouru. A l’écart, sur le rebord de soi et de sa chair, on imagine le monde tel qu’il aurait pu être. Si tout s’était déroulé autrement. Si tout avait souri à nos foulées entreprises avec l’élan de la fougue. Mais, on en revient toujours à la chute. On redimensionne notre esprit à la terre qui s’est effritée, à l’avalanche qui a recouvert nos ombres et notre misère.

Je suis revenu mille fois au chevet de notre histoire. Mon regard n’a jamais su se détourner de l’absence, de la place vide, de l’espace inoccupé. Il y a un trou grandissant à l’intérieur de mon présent. Une baie reflétant les ruines immobiles qu’une mousse verte a ensevelies.

Nous sommes partis, nous sommes allés ; à l’insu de nos liens, l’avenir nous a porté. La puissance des pas nous a entraînés. La force des jours qui se suivent et se renouvellent nous a départis. Une vie s’écrase sur une autre vie. L’air file vers l’éloge du temps. La fuite déblaie le jour de ses charges habituelles. Je ne peux plus tourner la tête, derrière moi, le mur s’est étendu de toute part. Mon dos le touche. Mes mains s’appuient dessus. Il atteint des hauteurs vertigineuses. On ne pourra plus jamais reculer. Il faut avancer, malgré la lourdeur des jambes, malgré le poids de la pierre restée dans nos ventres. La lourdeur c’est ce qui nous fait rester debout, c’est la sensation d’ancrage qui nous empêche de nous envoler, de nous survoler.

Demain sera lourd de mille choses et léger d’espérance. Demain ira rejoindre l’inconnu en se présentant chargé comme une mule à huit pattes. Quatre pour l’équilibre et quatre pour laver l’affront du jour qui s’est couché sans nous prendre dans ses bras. Et, il faudra reprendre le pas, écouter l’haleine de son cœur, remettre le jour dans sa camisole d’étreintes insupportables. Je marcherai les yeux plantés dans l’horizon, je marcherai nu, malgré l’étoffe de ton sang au travers de mon chemin. Mon futur, c’est désagrégé dans l’instant où mon pouls a tremblé comme la poitrine de l'air aprés une détonation. Je suis enrôlé à l’ombre de ton départ. Mes yeux piquent et ma voix se fait l’écho du vertige. Je te suis comme un vide s’appuie sur une matière disparue, comme un écho diffusé en boucle sur le rebord de mon cœur.

 

 

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