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LA COLLINE AUX CIGALES
30 janvier 2011

Peut-on, encore ?

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Comment vais-je pouvoir aller jusqu’à toi ? Morbide froid où la courbe de tes yeux est devenue le rectangle du dépotoir et la poubelle des mots. Voyelles d’amour un temps mariées à l’exclamation et aux virgules séparatrices des rythmes. Il semble que tu sois la Mort elle-même frémissante d’un éclairage infini où le blanc dévore les yeux, les mots et les dictées squelettiques des cimetières de silence. Dois-je mourir aussi pour que nos mains se touchent à nouveau ? Je t’appelle et tu ne viens pas. Mon cœur se déplie comme le drap qui te couvre. La Mort ne dit rien.

Au loin, tout au loin, des lèvres carmin embrassent mes paupières brûlées. Une voix ingénue danse des girouettes macabres. J’écoute Concert pour une voix de Saint-Preux, mais ton cœur n’y est plus et le vide chancelle, s’évanouie dans les mains de nos ruines. C’est une fête triste qui sommeille dans le curare. Nos marelles d’enfants n’offrent plus à nos pieds l’espace nécessaire pour qu’ils se posent. Ma parole griffonne encore quelques murmures à ce ciel improbable qui me demeure inaccessible. Ta Mort confirme mon infirmité à posséder le temps. Une poignée de plumes d’ange s’envole et la profondeur des cieux me retourne en boucle l’écho de mes frissons.

Prés du soldat blessé allongé dans mes entrailles brillent encore les éclats d’obus et de grenaille, ton souffle dans mes poumons.

Aujourd’hui, tu vois, le temps est une infirmière qui a perdu ses instruments. Et la piqûre porte l’aiguille comme une fine pointe filtrant mon chagrin.

On ne peut plus à présent fouler impunément les chemins qu’hier nous avions parcourus le corps léger et l’esprit curieux pour y piocher ce que la vie a conservé de beauté. Il nous faut d’abord étouffer le sanglot. Il nous faut préalablement effacer les cris et les regrets, les fouets et les désappointements. Brusque départ. Si soudain. Nos âmes déchirées et nos corps séparés. Nos existences en marge dans l’attente. Ce n’est pas tant ce qui disparaît qui me laisse dépourvu, mais bien davantage ce que la vie emporte dans le noir de l’infini. La blessure laisse suinter du soleil des larmes jaunes et les mots que je t’écris sont eux-mêmes des larmes d’encre que l’absence dénoue à mon impuissance.

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Commentaires
B
Oui, tu as raison if, l’acuité exacerbée a tendance à nous faire être victime de nos réalités. <br /> - Morbide froid où la courbe de tes yeux est devenue le rectangle du dépotoir et la poubelle des mots.<br /> Toute vie parle de la Mort. Toute vie est poignante, insurrectionnelle et protubérance de la Mort. Enfin, c’est ainsi que je le pense.
B
Merci Sedna, en effet, la lutte est irrémédiable à toute existence. Il me plait ici de paraphraser A. Jollien lorsqu’il écrit à peu prés ceci : « toute vie est une lutte, et il me plait de l’envisager telle un combat joyeux. »
B
Merci Ile. Ta lecture m’enrichit d’une voix. Le silence sait envelopper l’émotion.
I
Plus on devient lucide plus c'est dur à vivre, en ce sens ce sont bien les illusions qui nous font vivre. Jusqu'à ce que l'édifice s'écroule. Les illusions perdurent --- dois-je mourir aussi pour que nos mains se touchent à nouveau? et posséder le temps, l'amour et la mort intimement mêlés. et cela renvoie à l'écriture aussi. Mais pourquoi dépotoir et poubelle? ce ne sont pas des déchets que tu jettes là.<br /> ce texte est poignant. tout texte qui parle de la mort est poignant.
S
"Nos existences en marge dans l’attente". Comment lutter contre la mort, c'est elle qui gagne dans le combat de la vie.
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  • Dépotoir et déposoir de mots, de pensées... Ici repose mon inspiration et mon imaginaire ; une sorte de maïeutique effrénée et dubitative et il me plait de pouvoir partager à qui veut bien.
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