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LA COLLINE AUX CIGALES
15 juillet 2010

Blaise Pascal

femme_gros_seins

« Le peuple est vain »

Blaise Pascal
Pensées

Comment ne pas s'indigner d'une telle sentence quand le peuple est pour nous le rempart de la sagesse ? Quel philosophe pourrait aujourd'hui assumer un verdict aussi dédaigneux ? Pour Pascal, le peuple ne désigne pas une entité sociale, mais la société dans son entier, et la vanité n'est pas seulement synonyme de vacuité. Ce qui ressemble à une méprisante condamnation revêt donc une tout autre signification.

Courir après un lapin, craindre et respecter les rois, tuer son ennemi au combat… Voici des exemples de cette vanité du peuple sur laquelle les Pensées de Pascal posent un regard amusé et tragique. Mais en quoi la chasse, le respect des conventions sociales ou la guerre sont-ils vains ? Pascal en dresse un tableau pittoresque : si nous courons après un lapin c'est pour la chasse, non pour la prise ; si nous nous inclinons devant les rois, c'est parce qu'ils sont affublés de gardes, laquais et tambours ; si nous croyons juste de tuer l'ennemi, c'est en raison du tracé des frontières. Loin d'être rationnelles, ces attitudes exhibent a contrario leur manque de fondement : à les observer, elles semblent privées de sens parce que produites par une cause dérisoire. La vanité est précisément cette inconsistance des raisons ou l'absence de cause -véritable. Pascal voit ainsi dans la société humaine un cortège de situations apparemment absurdes.

Faut-il alors pleurer du ridicule de cette humanité vaine et, partant, misérable ? Au contraire ! Car la vanité provoque à son tour le rire, fût-il moqueur. Mais railler le peuple ne suffit pas. Il faut en outre rendre raison de ce qui apparemment n'en comporte aucune : Pascal dévoile dans ses Pensées la rationalité qui gouverne secrètement la société des hommes. Ce qui est vain en apparence est en réalité très sain. La vanité du peuple est en fait, pour le chrétien qu'est Pascal, une réponse parfaitement adaptée à la condition humaine d'après le péché originel qui, coupée de Dieu, l'est également de la justice naturelle et des vérités divines. L'hérédité de la couronne et l'obéissance à la coutume, pour absurdes qu'elles soient, permettent de suppléer l'absence de fondement naturel de la justice. La société humaine trouve par là un ordre « admirable » qui prévient sa dissolution dans la guerre civile.

Le peuple est-il alors vain ou sain ? Les deux à la fois. Le peuple a certes raison de se soumettre aux lois ou de « distinguer les hommes par le dehors, comme par la noblesse », mais il demeure vain « parce qu'il pense que la vérité est où elle n'est pas ». Il honore les gentilshommes parce qu'il prend la noblesse pour une grandeur réelle et se soumet aux lois parce qu'il les croit naturellement justes. Vain et sain à la fois, conclut Pascal, le peuple est finalement, du point de vue de la vérité, malsain.

- Cécilia Bognon-Küss -

Blaise Pascal en six dates

1623. Naissance à Clermont-Ferrand.

1640.Publication du Traité sur les coniques, premier écrit scientifique.

1644.Mise en vente de la machine à calculer, la Pascaline.

1654.Seconde conversion lors de la « nuit de feu ».

1656.Publication des Provinciales, et prise de notes en vue des Pensées.

1662.Décès, à Paris, à la suite de convulsions répétées.

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