De cette vie qui échappe à l’oubli.
Ta peau et ta chair tantôt corps de brûlure et de feu, tantôt jouissance et contacts identitaires. Ta peau comme écriture d’actes et lecture d’émotions. Ta peau se substitue à ton être et apprivoise l’absence, le manque, dans l’évanouissement.
Tu t’élances dans le hors de toi pour revenir irréductiblement à la passivité de ton appréciation du monde et des hommes. Indéchirable de vie, la mort te borde comme un espace de néant à tes faux pas.
On se désire autant qu’on se manque dans une aspiration de frissons, une concordance d’appels, une ressemblance qui nous dépouille. Nus, nous abritons l’indéchiffrable de nos réels. Ailleurs, nous ne sommes jamais que dans le déguisement. Seul le toucher ne désincarne pas la vie à une simple image. L’étreinte des mots et des ondes portée à son paroxysme ouvre la nuit et goûte à l’invisible d’une tangente où vérité et réel se rejoignent. C’est en fermant les yeux que nous accédons le mieux à l’autre. C’est dans la sensation d’unité retrouvée que nous puisons dans autrui. C’est dans la lumière éteinte des miroirs que les corps s’épuisent à reconnaître le lait de nos immanences.
« Cette destruction des images est bien une libération, elle interrompt une soumission, elle arrête la dépendance à l’égard de l’extériorité. »(1)
Nos fissures incisées au cœur du consentement de l’absolu de nos chairs en mouvements refusent à la lumière de nous abasourdir. Le noir laisse nos âmes dans leurs mystères et nous offre de nous confondre à lui. Comme effacés nous plongeons ensemble dans l’invisible et nos résonances deviennent des lieux de certitudes.
Nous nous affleurons alors comme deux bouquets de baisers désemplis du monde et nos extrémités défaites de tout ce qui n’est pas nous s’épousent dans l’affirmation de nos complicités à nous saisir jusqu’à nos sangs où le battement de la vie rayonne comme le fuseau illuminé de nos tentatives à nous articuler d’un seul jaillissement.
(1) Michel Henry - Incarnation, une philosophie de la chair -