P87 - Sur les flancs.
Un collier de morsures comme mille dents pointues
Dans le fond des gorges, dans le temps emietté
Que l’on porte comme une parure fourbue et têtue.
Un tour de cou, un tour de nous, une poche trouée
Où s’écoule la larme triste de l’attente qui pleure
Un harnais de fer autour d’une éponge de beurre
Un ventre déchiré comme un tonneau crevassé
Qui borde les ports où toutes voiles parées
L’absence se dilue dans un chagrin de brouillard
Dans un crachin de poisse qui lui sert de foulard
Dans une bouche qui a faim et qui mord le cœur
Comme un loup affamé au centre des douleurs.
Une terreur et une pitié qui rongent les pierres
Que tu as laissé derrière pour ne pas te perdre.
Une musique claire sous le porche de lierre
Se suffit à hurler et à chevaucher ton abécédaire
Comme une consonne insuflée à tes poussières
Dans une nuit de chine hors de toutes frontières
Qui va en charette à tire-larigot au bout de ta prière
Sur les comptoirs vides des riens de misère
Qui se frottent à ton enclos comme à ta terre
Perdue dans les œillets de tes cimetières.
Crispée ta moue se fond à la porte cochère
Et ta peine qui s’étire se perd dans ta volière.
Tes yeux sont des pages blanches et bleues
Où s’inscrit le petit jour des aubes naissantes
Que tes paupières fluètes ouvrent au feu
De toutes ces trames pavillonnantes
Qui se gomment sans cesse dans la répétition
Et ne conservent rien de ce qui se termine
Pour ne voir vraiment que la perdition
Au bout du couloir qui t’élimine.
Et, je te conserve au fond de moi
Sans savoir qui de toi ou de moi
Préservera le flash en sa conscience
Comme une spirale où glisse la patience.
La vie qui croise la mort sait qu’elles sont pareilles
Jumelles de sang aux ombres des nids qui s’éveillent
L’amour est ce radeau jadis où Noé a transporté
Le déluge d’un temps écoulé en une nouvelle demeure
De ce qui fut nous avons conservé ce qui pleure
Tout au fond des trésors que la tempête a colporté
Des abysses inconnus au rythme des vagues
Qui ourlent encore dans nos petits récipients
Où s’inondent nos peurs dans le silence omniprésent
Comme des nuages bavards sur les flancs descendant
De nos déboulis de souvenance que le temps élague
A des fins de durée qui échappent à toutes vérités.