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LA COLLINE AUX CIGALES
4 février 2010

Les mots d’amour sont-ils que des mots, ou des preuves concrètes et pragmatiques ? (Suite 5)

L_OEIL_du_MIROIR_REFLETS

Paroles contre paroles. Nos entretiens sont des maintenances où nos ondes s’agrippent comme des coquillages aux rochers de sous les mers. Tes mains m’enlacent comme des algues filaires et je m’éponge aux mousses de tes lèvres.

C’est ici où rien ne pousse, où les déserts sont des sables de lumière, que nous jaillissons comme des oiseaux sages de nos greniers d’amour. Ta bouche est de velours et tes yeux de longs rivages, où mes eaux salées viennent à marée basse te dire la douceur qui m’étrangle.

Nos entretiens sont des colères que rien n’avait su entendre et nous purgeons nos cumuls anciens comme des navires trop chargés. Nous lestons nos révoltes et nos légèretés soudaines nous donnent des ailes. Nos mots et nos peines s’envolent et notre seul tourment est de nous offrir tel que nous étions. Le présent est à l’ivresse des taches lointaines que nous exultons de nos cœurs qui ont trop gardés. Ta voix de sirène chante l’alizé et nous marchons ensemble sur les frontières de nos vieilles pensées.

La douceur qui devient colère s’appréhende en son revers et nous voilà spectacle là où nous n’étions que des ombres. Et nous voilà théâtre, là où nous jouions des scènes pas tout à fait connues. Tes mots sont des tirades et nos gestes des réflexes que nos incantations n’avaient pas suffits à ouvrir comme des brèches. Que nos promesses n’avaient pas su enfanter autrement que dans les prisons de nos rancœurs. Tant d’amères lanternes pour effeuiller de si tendres désirs nous déciment, qu’il serait difficile de ne pas nous oublier dans la brume de nos bras.

Je viens à toi comme une vague que tes plages accueillent. Tu viens à moi comme un serment qui n’aurait jamais existé. Nos corps sont des arquebuses et nous sommes des projectiles que nos déraisons transpirent comme des buées de nos liqueurs où s’en va dormir le jour.

Paroles contre paroles, nous nous endormons dans la faille où nos émotions crépitent avec nos limons. L’amour est un sauvetage, une bouée percée qui flotte encore sur nos cris et nos larmes et demain est un fil d’argent pour suturer nos espoirs grelottant à vivre et à aimer à satiété.

Rien, pas même un mot. Vertige du primitif en moi, de l’eau native où naît sans cesse le premier cri, la première onde d’air. Oui, vertige. Non pas des cimes grimpant l’horizon, mais des descentes régulières aux fins fonds des réservoirs d’oxygène où les mots reprennent du souffle.

Il n’y a plus de corps, il n’y a plus d’odeur. Je dors dans l’amputation de l’oubli, des greffes incertaines et des reliefs inoculés d’ombres moites.

Tes mots sont des lianes, tes mots sont des radeaux perdus comme des bouteilles jetées à la mer. Mon sang est dans la bouilloire du temps.

Tournis capricieux dans l’immanent des chapes de plomb. Même la peur, même la rage s’évanouissent.

On ne se délivre pas plus de l’amour que des mots qui l’encense ou le perturbe. La discrimination est un habit de visions occultes. Elle grince dans mon crâne, becquette les alvéoles de mes chairs vierges où sont restés ouverts les chants des vagues des tempêtes lointaines.

Je n’ai pour t’écrire que ce parfum iodé qui colle encore à tous les dires. Je n’habite plus les grâces et les disgrâces de mes élans. Mon désir est sans nom, hors de moi, hors des mots qui l’épellent. L’intemporel se cogne à l’éternité qui se réinvente.

Ce qui ébloui laisse les yeux pleins de lumière. Aveugles, nos regards chantent les mots morts dans une incantation vibrante que nos sentis épluchent comme des fruits à la peau durcie alourdissant nos paupières.

En nous l’enfance replonge dans son fœtus à la recherche des illusions et du temps perdu qui nous a offert la porte en nous y refusant la clef.

Nomade au pays des nostalgies, ce qui se grave encore à l’heure nouvelle qui se présente comme des ailes d’hirondelles, ressemble à l’exultation qui déborde un immédiat nu de toute vraisemblance.

L’amour se présente comme une douleur solitaire. Le feu des forgerons du cœur déploie ses flammes bleutées comme les reflets de nos mers les plus insondables. Aucun mot ne saurait traduire la langue de nos présences à exister dans leurs expressions. Ce n’est que muets que nous nous rejoignons sur l’île de nos partages, dans le silence profond que nous nous offrons comme l’eau se confond à la pluie.

Exutoire brûlant. Il y avait des eaux brûlantes chargées de sédiments, il y avait des feux gonflés de mémoires pures. Et puis des trajets, des va-et-vient continuels, des courses aux circuits fermés, puis ouverts. Des amoncellements de glaises avec des grumeaux flottant à la surface, des tourbillons de vapeurs pénétrant toutes choses. Tout un ailleurs en transits et en dépôts chargeant les mailles de l’air et du temps jusqu’à l’assouplir en un souffle invisible et tenaillé de lumière froide, presque bleutée.

Un premier cri comme un premier son d’espoir. Une vie chétive claire et tout en désordre de vides apparents. Une vie en escorte à la matière, un mouvement, un entrain, une ardeur inoculée en des lieux aux formes mouvantes, transformées d’un point à l’autre du passage. Devenue apogées, devenue désastres. Devenue le récit paradoxal sur le bout d’une langue sans bouche, d’une gorge sans parois.

Tous les points de couture filent et faufilent une tragédie qui n’en finit pas de s’époumoner.   

Il te faudrait laver tes vestiges pour avoir la langue propre. Nos langues accrochent encore au chaos qui les a déliées, couvertes de plaies glorieuses du fantôme inconsistant qui ne sait prendre corps et dont nous ne savons nous défaire. Dédiées à la parole crochue qui fourche comme un cep de vigne naissant, elles s’épuisent dans le colimaçon des heures désuètes. Dans l’imposture, on s’enlise dans un mensonge que l’on voudrait protecteur. Nos bouderies sont à l’imaginaire, et elles dessinent les radeaux par lesquels nos fuites pourront d’échapper.

Du hasard au déterminisme, le balbutiement de nos volontés rompt au destin sa part rigoureuse de chienne qui aboie l’amour dans la pénombre des forêts où se cachent l’énigme et la féerie. Dans cette nuit clair-obscur où se terre ce qui remue. Blessés que nous sommes par l’indifférence des autres, alors que nous vivons des moments qui nous semblent capitaux par l’intensité qu’ils font jaillir en nous.

Seul d’avec tout le monde, à l’écart avec pour seul rendez-vous soi, dans une quête qui n’a rien d’obsessionnel si ce n’est l’obsession elle-même larvée de curiosités et des besoins de comprendre pour savoir estimer. D’une compréhension par-dessus la compréhension. D’une défaite par-dessus la défaite. A l’instinct des maladies endormies. Encore.

Flottants à la frontière de la lumière, nous sommes habillés de haillons de couleurs sans éclats, suffoqués de délires silencieux.

S’il s’agit d’amour, alors nous succombons dans des travers où chacune de nos faiblesses tend à devenir la gloire de nos renoncements.

Tu me découvres de ce que je suis fait parce que tu es là, présente, comme un miroir reflétant de ma carcasse tout son dérisoire.

Nous chuchotons le rétablissement de nos déconvenues, en nous vengeant virtuellement de la carence parce qu’elle nous a conduit à supplier, à implorer de l’autre son regard compatissant et son consentement.

Il nous faut fabriquer dans le mensonge, une ignorance encore plus forte que la réelle pour mieux recouvrir le désastre de nos incompétences.

Puis, assortir les mots en bouquets pour leur faire prononcer un aveu si grand et si fragile que toute notre vulnérabilité fait trébucher le sens, qu’initialement nous avions voulu lui donner. Confier tant de désespoir à de si petites expressions fait sans nul doute leurs grandeurs.

L’admiration nous est consolatrice, elle nous réconcilie, du moins un temps, avec notre ego gargantuesque, mangeur carnivore, dévoreur d’identité.

Toujours en course pour essayer d’atteindre la réalité, oubliant qu’elle n’a de corps et de texture autre que la force qu’on lui attribue pour arracher de nos têtes les images qui y flottent. Quintessence subtile où s’extrait l’overdose comme des supputations léthargiques.

De l’imaginaire se réalise la prostration vécue comme une castration. Le fantasme devient une offrande.

Se fier à l’instinct est alors s’accomplir des signes et des marques déjà inscrites dans nos profondeurs sans en avoir l’air. Et amplifie cette sensation que de ne plus s’appartenir mais d’habiter un autre. Un étranger connu qui dicte malgré nous le cheminement du consentement. L’itinéraire, tout à coup, devient la convergence du hasard et du destin.

Je ne veux pas, je ne peux pas accepter les choses en cet endroit, en cet état. Qu’advient-il alors de mon libre arbitre, de ma volonté et des choix obtempérés tout au long du trajet ?

Pantin parmi les pantins, mon cœur serait-il alors le centre de tous mes instincts auxquels je devrais impérativement me plier, parce qu’humaniser, sentimentaliser, porteur d’émotions lourdes de conséquences ?

Je ne peux pas. A chaque instant d’un choix, ma volonté combine avec le réel et ma capacité à vivre ce dernier tend à devenir comme le seul possible.

Le mot projette. Il est projectile qui a traversé le temps, traversé la chair, traversé tous les paysages comme un ruisseau qui va de sa source à son déversoir plus grand que lui.

Que pourrais-je imaginer que je ne trouverais pas dans ma mémoire ? Même ce qui semble ne pas y être inscrit prend bien sa source dans un événement englouti depuis l’éternité.

Prend-t-on plaisir à s’effrayer de notre propre ombre ? Trouver la trace de l’être. Trouver la trace invisible aux multiples visages inventés pour mieux matérialiser un songe qui voudrait sortir du néant afin d’indiquer irréfutablement la portée puissante de son dictat et de ses caprices.

Tout est toujours inachevé. Même lorsqu’on croit terminer une histoire, un songe, une idée se réveille malgré nous, malgré le temps écoulé ; soit parce qu’une bribe d’émotion se réanime, soit parce que le hasard est foudroyant du réveil qu’il occasionne.

Ecrire ne serait rien, si l’encombrement des émotions qui nous habitent et que nous habitons simultanément ne nous laissait sans voix. Si ce n’était seulement cet amas de frissons qui nous régit en amont de nos pensées et qui cherche toujours à nous traduire ce qui vient de notre silence le plus fermement capitonné.

Les dictées de l’expérience nous indiquent de renoncer à soi-même pour avoir la chance de se visiter, de se faufiler et de s’arpenter comme un chemin boisé au cœur d’une forêt.

Je ne suis qu’un hasard dont la bosse rappelle toutes les misères recueillies tout au long de la traversée.

La foi qui ne périe pas, quelle qu’elle soit, détient toute la puissance du monde des hommes, comme la beauté qui se cache sous les traits confiés à des cicatrices, et qui restent malgré tout des lumières imputrescibles défiant l’éternité.

Celle qui plonge dans mon miroir et qui longe mes contours ressemble à tes courbes lorsqu’elles épousent le seul horizon possible pour répondre à mon affirmative.

La réalité ressemble toujours plus ou moins à ce que nous en désirons. Désirer, outrepasse toutes les notions et tous les concepts, dés lors que la puissance de nos aspirations couve l’incendie qui enflammera nos chemins.

L’équilibre reste ce fil précaire où les songes se déposent. Egaux à nous-mêmes rien ne vrille davantage que le perçu que nous ne retenons pas.

Nos lectures du monde peuplent nos convenances à nous discréditer des élans que nous avons l’un envers l’autre. Nos peaux transpirent l’aisance fausse de respirer nos convictions comme des inhalations propres à nous désinfecter des fièvres qui nous aguerrissent pour un temps des faiblesses qui nous environnent.

L’amour est ma seule capacité à me perdre d’un combat joyeux (1)

À l’heure brève et coutumière. Partout le manque de davantage, la famine du plus, la disette des mots qui peignent les étoiles, partout la pénurie des cendres des histoires immobiles et l’absence de pluie des heures immédiates. Partout le visage désœuvré des je t’aime qui ne vont pas au bout de leur vigueur, de leur challenge à décrépir les images et les symboles usuels. Partout le quotidien comme une offrande, aussi.

Viendrons-nous à bout des carences ? Etancherons-nous les insuffisances rédhibitoires ?

Tes yeux sont des infinis où logent toutes les présences de corps vides. Tu les habites tour à tour comme l’on essaye un vêtement neuf. Aucun d’eux ne te convient parfaitement. Chacun d’eux s’accompagnent d’une moue révélatrice de cette errance lourde, nomade indiscutable du pas assez.

Ce qui s’éveille en nous et appelle à être comblé, n’est jamais repu. L’acte qui rebondit du verbe reste sur sa faim. Avide permanent du plein qui apporterait la plénitude complète. La totale paix des ferveurs absolues. Eros nu est dans son manque. Le besoin guète comme un vautour. Absolu, voilà bien le mot lâché !

Philia est fille au sacrement, aux engences compassionnelles, aux courses qui se font en marchant, dans le recul des distances de chair où s’émancipe le regret.

Lâché en pâture à notre insatiable appétit. Nous qui nous sommes émerveillés, il y a peu, d’un minuscule événement, d’une poussière enchanteresse, d’un infinitésimal paraissant remplir de toute part nos êtres.   

Nous voilà à nouveau dans l’attente. L’attente à rompre.

Déjà le jour était dans son éclat, déjà tes yeux comblaient le silence.

Ton ombre nourricière se penche sur moi et lèche comme une flamme douce les braises à demi éteintes. L’effleurement livre une caresse bavarde. Le vide s’illumine de scintillements. Peut-être des étoiles fluorescentes. Ce qui se creuse de toi à moi n’est plus une distance. Flottement dans la pensée. Nos cœurs transpirent comme des fruits restés sur une branche que le soleil porte aux larmes sucrées des instants qui ont longuement macérés. Nos jus se confondent aux buées corporelles. Nous baignons dans l’effluve de nos fleuves souterrains. L’eau est conductrice. Transitent nos frissons d’un bout à l’autre de nos tunnels et les vagues recouvrent aux rythmes de nos désirs la masse invisible de ce que nous escomptons de nos étourdissements.

Ce que nous voudrions nous signifier est dans la pause.

Nous attendons que le momentané et l’instantané se rejoignent en boucle sur le bout de nos langues.

Caché, ce qui crépite, pétille dans nos gorges devenues les bougeoirs du frétillement jouant une sonate d’imprévus. L’impératif est fugace. Nos bréviaires récitent des chants de cigales entendus les soirs d’été sur les rives sensuelles de nos unissons. Et déjà, l’essoufflement de l’insinué. Et déjà le racle grinçant des abandons. Déjà sonnent dans nos silences établis d’autres clapotis, d’autres aspirations, d’autres souhaits que l’heure brève ne pourra délivrer. Le désir est un passager temporaire. Il claque et frappe de ses réclamations et sitôt dans l’abondance s’enfuit vers un ailleurs restant à contenter.

C’est pourtant lorsque je ne suis pas rassasié que la nuit fait ses plus belles grimaces. Ce qui est en amont la naissance et qui féconde comme une pulpe douce au fond des ventres laisse à l’absence son goût de lait tiède. Demain, encore, nous boirons à cette herbe blanche et nous danserons dans les champs comme ces germes dans l’air qui virevoltent sans trêve, et se déposent sur le dos du hasard comme des bouts de vie prêts à éclore.

(1) expression chipée à Alexandre Jollien

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