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LA COLLINE AUX CIGALES
21 décembre 2009

E - 026 - Brèche par où la vie.

Nu_rouge_medium

J’ai reçu des montagnes qui se dressent jusqu’au jour, leurs silhouettes taillées dans la lumière comme des temples reliant nos esprits aux myriades d’étoiles qui les accueillent. J’ai reçu l’eau des mers mariées aux écumes flottantes, des vagues survoltées giflant l’horizon comme une paillasse gouvernée par la poussière, la fierté et l’orgueil. J’ai reçu les frondaisons des paroles hurlantes des sons et du givre qui refuse de fondre même au soleil éternel des hautes cimes. Reçu de la pierre son chant étouffé, sa suprématie à maintenir en sa matière la rage de poursuivre le temps au-delà des rythmes humains. Reçu des fonds marins, la mélancolie des braises et des flammes mouillées des mémoires d’ailleurs. J’ai même conservé sous les paupières, le pouls murmurant des tempes du silence.

La vie comme une goutte de rosée, délivrée de la sécheresse rugueuse se fond comme un souffle qui se déplie en avançant dans l’être. Les nuages montés en neige conservent l’énigme d’une dimension toujours plus grande. En respirant l’air s’agrandit et s’étend à perte de vue, à perte de mesure, à perte d’intonation. La voix ressasse l’écho de ses pertes et reflète l’abime comme un miroir brumeux où les paroles cherchent à tâtons l’impulsion prisonnière. Et les mots creusent comme un lièvre faisant un terrier, comme un funambule cherchant sa corde. Des rumeurs encore tièdes disent le poids insoutenable qui pèse sur les ombres. L’heure est faite de replis, de détours et d’incertitude. En prolongeant le pas, le temps se déploie. En avançant, l’immensité dépasse l’immensité et perd à tout jamais la trace infinitésimale d’un éventuel commencement. Tout est devenu provisoire. Le provisoire comme une épingle dans une meule de foin égare les regards dans un noir étanche recouvert de craintes et d’imaginaires.

Ce qui ne s’accomplit pas reste prisonnier du désespoir. D’un désespoir intense qui offre au lieu des naissances incontrôlées et souvent imprévues, des enfantements pas toujours accueillis dans l’émerveillement. La parole, alors, souffre l’embarras et retient sa verve naturelle dans des lieux secrets, privés de résonnance.

La parole est l’apparat du silence, elle tousse et c’est les mots qui s’enrhument. La voix devient tremblante et le silence indescriptible.

Homme parmi les hommes, corrompu depuis la première heure à des sécheresses du dedans-dehors, mes bras enveloppent la brassée d’émotions qui sifflent l’aigu avant de se noyer dans la faille. Mes mains s’ouvrent comme des parapluies et ne reteignent rien. D’où je suis et où je vais, nulle armature, nul tissu, seulement des impalpables qui fricotent le caillou resté dans mon ventre. Caillou rougi des frictions incessantes du vide qui se rassemble comme un ciel de chair d’où aucune pluie ne viendra laver et purger. Seul, entouré de tous et de tout, dans un coupe-souffle, un paravent d’algorithmes, j’essuie la bravade. La faille crie toujours sa carence, et reflue sa bave gracile. Au loin dans le dépourvu des alliances et des épanchements inconnus, un pays chuchote de cette brèche aux cuisses demeurées entrouvertes, une langue pure qu’aucun piétinement n’a pu salir.

L’impossible de se dire de trop prés, l’inaccessible des sources du chant qui inonde toutes les prospections aventureuses, nous accorde à la flânerie volatile où le réel se meut en des dentelles fragiles autour d’un noyau rivé sur le paroxysme comme un phare à la lumière girouette, posté sur les cotes abruptes des falaises.

La vie se vidange là où l’être se réconcilie avec la durée et la parole comme un lien sacré d’avec nulle part résonne de ses fibres de permanence inoculée d’atavisme que le perpétuel ignore comme quelque chose de broyé dans l’éternité.

Il faut que le jour tue la nuit pour que les bourgeons de promesse viennent nous offrir l’espoir nu des laitances nouvelles qui compensent l’échu disparu dans la brèche.

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