C092 - Badaboum !

Ne ressemblez plus à rien. Ne soyez plus vous-même.

Déloger le vide de soi pour en faire un horizon. Ne plus être qu’un souffle d’arc-en-ciel et l’éclair d’un tourbillon sans mot. S’apparenter aux fluides impalpables et éthérés. Ne pas chercher à rejoindre la glaise des ondes originelles, s’y pourvoir comme une molécule étrangère à la débâcle des chairs lorsque trompées par l’usure des contraintes, l’illusion repousse le réel. Ne ressemblez plus à rien. Ne reconnaissez pas les ruines qui vous condamnent, déchaînez le maillon. Dans la distance je vois le cadavre de ce que je fus vivant. Je ne sais cependant pas de quel ruisseau je vais et je viens dans une recomposition changeante et toujours égale. J’aborde les cimes en auscultant les bas fonds. D’un tombeau je poursuis les racines de terre et m’infiltre dans les veines souterraines à la recherche évidente de la faille qui conduit au soleil. Ne soyez plus vous-même. Prenez la forme de l’espace que vous habitez. Dans l’arbitraire lieu de soi, le passage. La feuille du temps dans sa nouvelle édition. On n’est jamais perdu lorsqu’on ne sait plus. On pèse la lune légère comme une plume. Le visage de soi dans les décombres, le souvenir d’une ride inscrite par l’effroi. Une vie, un cerceau, un effluve. Ne me dites pas qui je suis, je ne veux pas le savoir. Ne ressemblez plus à rien, dites le silence de votre précipice, la flamme de votre chaos. Ne soyez pas. Emportez-vous comme un air de chanson dont le refrain s’oppose à la rengaine. Aller plus loin est divertir l’immobile, ajuster le frisson aux combinaisons de l’unité qui s’effrite pour changer de peau. Je suis de l’apocalypse régénératrice d’un atome sans cellule. Ma prison à moi c’est la vie que je n’occupe pas. L’ancrage déchire la chair sensible. Et je meurs chaque fois des élans qui me poussent hors de ma gorge.