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LA COLLINE AUX CIGALES
24 septembre 2008

SOCRATE

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Le carré de Socrate

Comment reconnaître la vérité, ce que nous ne connaissons pas déjà ? En se « ressouvenant » des choses, répond Platon. Le savoir est réminiscence, et chaque homme possède des indices du vrai et du faux.

Par Blaise Bachofen

Dans un dialogue, Platon met en scène Ménon, jeune ambitieux, élève du sophiste Gorgias. Il défie Socrate de résoudre la question suivante : peut-on apprendre la vertu (arétê), c'est-à-dire la capacité à conduire au mieux ses affaires et les affaires publiques ? Peut-on acquérir un savoir solide et objectif permettant de prendre les meilleures décisions ?
Ménon formule le problème suivant : si nous cherchons à savoir ce qu'est une chose (en l'occurrence la vertu), c'est que nous n'en possédons pas la connaissance. Dès lors, en imaginant que nous trouvions la réponse, comment saurons-nous que c'est la bonne ? Il semble impossible de reconnaître ce que nous ne connaissons pas déjà. Cette objection est forte : il s'agit de savoir si nous possédons un indice de la vérité, qui nous permettrait d'avancer de façon sûre dans la recherche du savoir. Si Ménon a raison, toute science est impossible.
Socrate répond en s'appuyant sur une hypothèse : en réalité, lorsque nous commençons à chercher, nous ne sommes peut-être pas aussi ignorants que nous ne le croyons. Selon certains récits mys­tiques, dit-il, l'âme a contemplé, avant de s'incarner dans le corps, toutes les vérités, dont elle garde un obscur souvenir. Bien conduite, aidée par la maïeutique, l'âme peut reconnaître la vérité, car « chercher et apprendre n'est autre chose que se ressouvenir ». Le savoir est réminiscence.
Cette croyance est-elle vérifiable ? Socrate la met à l'épreuve. Il fait approcher un des esclaves de Ménon, qui n'a jamais reçu d'instruction savante. Il va traiter avec lui un problème de géométrie. Soit un carré dont chaque côté mesure 2 m
(Socrate parle en pieds, on choisit le mètre pour plus de facilité)
: sa surface est de 4 m2. De quelle longueur doivent être les côtés d'un carré pour que sa surface soit double, donc égale à 8 m2 ? L'esclave suppose d'abord que les côtés du carré doivent avoir 4 m de long, puis 3 m ; mais il reconnaît que la surface serait alors de 16 m2 (4 x 4) ou de 9 m2 (3 x 3). Finalement, Socrate montre la solution : il trace une diagonale dans le carré de 4 m2. Il le coupe ainsi en deux moitiés : deux triangles ayant chacun une surface de 2 m2. Puis, à partir de la diagonale, il construit un carré dont les quatre côtés ont la même longueur qu'elle. L'esclave se rend alors à l'évidence : la surface du carré obtenu fait 8 m2. Le carré contient quatre triangles dont la surface est à chaque fois de 2 m2 ; soit 4 x 2 = 8.

L'esclave ne trouve certes pas seul la réponse, mais il propose des solutions qui s'en approchent peu à peu, il voit bien quand il se trompe, et surtout il reconnaît sans hésitation la vérité quand le philosophe la lui montre. C'est cela que Ménon estimait être impossible. L'hypothèse de la réminiscence est-elle pour autant confirmée ? Ce que Socrate a prouvé, c'est que, dans notre quête de la science, nous ne sommes pas aussi démunis que l'affirmait Ménon. Nous possédons en nous des indices du vrai et ­du faux. Or, dit Socrate, être convaincu de cela est ­l'essentiel : nous sommes encouragés à chercher la vérité. Alors que l'objection de Ménon maintient­ l'esprit dans la paresse de l'ignorance.


Réminiscence ou anamnèse
Selon des mythes pythagoriciens, l'âme vit une autre vie après la mort puis se réincarne. Socrate donne à ces mythes un contenu métaphysique : l'âme séparée du corps contemple les essences de toutes choses puis les oublie, mais peut en retrouver le souvenir par un travail de réflexion.

Maïeutique

Du grec maïeuein, accoucher. Socrate compare sa méthode au savoir-faire de sa mère, qui était sage-femme. En plaçant ses interlocuteurs face aux contradictions et aux insuffisances de leurs discours, il fait accoucher leurs esprits d'un savoir dont ils ne se savaient pas porteurs.

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Commentaires
B
N’étant point encore mort moi-même, je n’ai pas de réponse !
G
et quand l'âme est marte<br /> de quoi se souvient-on?<br /> de l'accouchement crasseux, ou de la chienlit...?
B
Dans le par défaut, le reptilien qui sommeille en nous prend le relais.
S
Le mouvement vertigineux de la chute le rend incapable d'appréhender...
B
Il choit de ce qu’il est capable d’appréhender.
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  • Dépotoir et déposoir de mots, de pensées... Ici repose mon inspiration et mon imaginaire ; une sorte de maïeutique effrénée et dubitative et il me plait de pouvoir partager à qui veut bien.
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