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LA COLLINE AUX CIGALES
27 mai 2013

L’horizon n’excède pas ma pensée.

Danae_et_Zeus_Jean_Joseph_Chevalier_685x1024L’appauvrissement des lagunes désespère le temps qui nous sépare. L’heure est restée accrochée dans les buissons. Nous sommes empaquetés dans le désordre des nuits qui ne reviendront plus accoucher de leurs charmes. Ma tête se vide et se siphonne comme une marée se perd dans les voiles de la brume. Nous ne sommes plus rien. Sous la mitraille du quotidien, les arbres effeuillés retournent à leurs racines. Du vent et de la pluie mélangés traversent la plaine où nous courions le cœur attaché à des cerfs-volants. Notre regard enduit d’arc-en-ciel trouve la terre trop ronde pour qu’elle puisse nous offrir ses fruits. Tes yeux sont brisés dans ma poche et la main dans la poussière je sème tes cendres au fond de ma gorge. 

Notre vraie vie, je la reconnais dans ta mort. Elle a la bouche en sang et les cheveux entortillés aux fous rires qui nous transportaient comme des plumes au-dessus des encriers. Les mots ont des masques, je ne sais plus lire nos serments qu’avec les yeux inondés de boue liquide. J’ai le cœur battant derrière l’horizon qui s’effondre.  

Il n’y a plus rien qu’un air vicié, qu’un souffle vissé sur nos pantoufles anciennes. Je regarde derrière, il n’y a plus rien ; rien d’autre que le blanc indétrônable. Tes lèvres gercées planent sur des images ravinées de sel et de souffre comme celle d’un dessin de Jean-Michel Folon. La ponctuation de mes rêves est ce trait jamais tiré sur mon âme ni repue, ni affamée. Il n’y a plus rien pour dissocier le temps de ses tiroirs remplis d’éternité.   

Dans cet immédiat où tout est loin, mon désir tisse ton image et ma poitrine se gonfle comme une voile. Dans l’apparence, nous sommes réduits aux regards que nous portent les autres. Ils me renvoient l’image de ce que je semble être : un couteau édenté dans le noir du cœur. Mais ton œil tranche et découpe l’invisible pudeur de la chair qui m’entoure comme un halo de rouge épais. Mon âme se détache comme une barque se défait de la corde qui la retient. L’espace est clos et sans vagues. L’horizon n’excède pas ma pensée. Seul, ton regard éclaire les étoiles qui me ravissent. Tes yeux sont des rivières où court la foule qui m’infiltre incognito.  

Je suis moi-même un hall de gare. Je suis traversé par ceux que je rencontre. Je suis visité d’anonymes silhouettes qui me parcourent à la hâte. Des chiens promènent sur mes trottoirs, des oiseaux dessinent des formes dans mon ciel, des parents proches occupent les allées parallèles aux rails qui s’étirent vers d’autres gares.

 

 

- Bruno Odile - Tous droits réservés ©

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