Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
LA COLLINE AUX CIGALES
17 avril 2013

Je ne suis pas ce que je dis.

0274kjk8

Le printemps reviendra, chassant l'été, balayant l’hiver. Alors je partirai. Je m’en retournerai dans mon terrier, dans monlit enchevêtré de mille sommeils. J’y gagnerai ma liberté comme l’on gagne sa vie à ne savoir qu’en faire. Et, j’irai me promener dans le désert comme une puce sur le dos d’un chameau.

J'ai appris la douleur en apprenant à respirer. J’ai su très tôt que le renoncement pouvait être fatal. La vie grave et ribaude accompagne le délabrement des mots tendres. Le temps est de la terre, il l’a remplie d’air comme un ballon que l’on gonfle. Partout le leurre est persistant.    

Je ne sais pas écrire joli ni beau, c'est une défaite. Ou pas. J'ai peur de lâcher prise, je sens le vide qui rôde. L’effondrement viendra. Nul doute. Il faudra fuir les lettres stigmatisées qui fanent sur la pointe du crayon. Il faut fuir l’écriture qui n’est qu’un précipice. 

L’écriture est comme moi, elle marche vers l’effacement. Elle se momifie puis cède à la poussière. Je touche la vie et ressens la mort. Je touche à toi et me replie dans la trame chaude de ma peau. Je voudrais bien pour une fois percevoir le senti de l’extérieur de ma chair. Mais la contrainte de l’arrachement ne parvient pas à me soumettre. Dans mon atelier d’écriture, l’expression touche à l’extérieur du monde qui m’infiltre. Mon corps se réduit au toucher des mots, à l’aspect tactile de la pensée. Ma main et ma langue puisent aux signes récurrents. Tous les codes s’entremêlent et s’interfèrent.  

Te dire et te raconter… Je me raconte dans un chapelet de silence intersidéral où le non-dit se purge comme une durite percée. Extraite du corps, l’expérience nourrit le récit des affrontements qui se déroulent entre mon royaume de sang et le monde. Chaque frontière, chaque paroi cède aux conflits diaboliques entre la perception et la raison.

L’énigme est davantage dans ce flot de rouge fécondé par je ne sais quel diffuseur de promesses. Je ne suis pas ce que j’écris. Je ne suis pas ce que je dis. Trop d’espaces vides demeurent entre mon désir et les sensations qu’il me retourne. Sans doute, le mouvement nu et l’infirmité du néant se dépèceront et succomberont aux résistances du réel.  

Dans ce délabrement, il ne s’agit plus de faire le vide mais de l’être. Le mouvement de l’histoire est fugitif. La fiction omniprésente chute dans l’illisibilité et dans sa mutité forcée. Le mot n’est alors qu’un résidu défait de sa trace originelle. La parole avale le bruit des gares traversées, absorbe la matière et choit comme une popeline de soie.

Notre corps transite par la matière puis nous lavons nos peaux à la fenêtre du ciel et de la mer. Nos os conservent le secret de la poudre. La poussière s’empale aux muscles de la lumière. L’air nous agite et nos frissons tombent comme des feuilles séchées.

 

 - Bruno Odile - Tous droits réservés ©

Publicité
Commentaires
LA COLLINE AUX CIGALES
  • Dépotoir et déposoir de mots, de pensées... Ici repose mon inspiration et mon imaginaire ; une sorte de maïeutique effrénée et dubitative et il me plait de pouvoir partager à qui veut bien.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Derniers commentaires
Archives
Newsletter
Visiteurs
Depuis la création 207 320
LA COLLINE AUX CIGALES
Publicité