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LA COLLINE AUX CIGALES
21 mars 2013

L’amour nous perd, l’amour nous gagne.

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Et puis, il y a cet absurde élan par lequel on redevient instantanément celui que l’on fût. En un éclair, les lèvres se gercent et le regard pâlit. Une lanterne passe par-dessus les ombres, le chemin s’éclaire brièvement puis disparaît à nouveau dans la pénombre. J’ai revu la chaussée que nous empruntions pour aller au collège. Les peupliers en bordure ressemblent aujourd’hui à des allumettes brûlées. Ta voix court encore sur cette route sans que je ne puisse l’attraper.  

J’ai rasé de prés notre histoire comme une ombre poursuit la lumière ineffaçable. La table où nous mangions est aussi rose que nos joues lorsque nous rentrions au chaud après des heures de balade dans le froid et la neige. Je remonte la houle, je fais face au Mistral. Ta main ne quitte pas la mienne, nous marchons voûtés comme des herbes écrasées par le poids de l’air. Quelque chose résonne dans nos poitrines comme le bruit d’une scie sur l’écorce d’un arbre. Mironton, mirontaine, des rafales tendres chantent dans les branchages. Nul besoin de fontaine, le bruit de l’eau escorte notre marche de papillons sur le givre.

Un cœur d’homme est une trop petite colline pour y trouver asile indéfiniment.

- Approche, ai-je cru t’entendre murmurer et donne-moi donc ta mémoire pour que je l’alimente des torrents de statues sans visage qui remplissent le ciel.

Lune froide, tes œufs sont dans le panier. De l’osier et du café chaud dans la bourrasque, je suis le dernier sur la route. J’entends le silence morigéner, l'aiguille éternellement tombée à côté de son axe. La boussole est grippée et figée sur un été en plein cœur de l’hiver. 

J’aime à penser que tu es là même si je ne te vois pas.  

Parce que la vie est inutile, elle est indispensable. Parce que l’amour est vain, il est essentiel. Il faut redéfinir la compréhension de façon incessante. Tout ce qui me rapproche du monde tel que je le conçois, m’enfonce dans la nausée de sa fonctionnalité. Il faut suspendre son bonheur à autre chose que soi et s’ériger au centre de la joie que l’on reçoit. Ce que l’on sait silencieusement en soi, on aime l’entendre dans le cœur de l’autre. Cela réveille le sens que nous pouvons donner à la vie. C’est ainsi que se revigore l’éclosion permanente. Ce fil d’or de la proximité nous propulse dans un immense panier de crabes où tout est en mouvement. L’amour nous perd, l’amour nous gagne. Ton exigence et ton incarnation soutenue à son égard sont l’intrication qui a conditionné ta chute.

 

- Bruno Odile - Tous droits réservés ©

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