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LA COLLINE AUX CIGALES
20 octobre 2012

Le nombre multiplié.

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Je crois qu’écrire m’ouvre à l’absence. A toutes les lacunes. A l'écart bouleversé de son chuchotement prostré. Parce que tu es cette présence décharnée de corps traduisant l’abattement mélancolique qui me tire vers le néant de moi-même. Et même si on ne conjure ni son sort, ni la mort, nos brouillons de vie demeurent des cacophonies indescriptibles, des pages de ratures illisibles. Mille traits dans un seul. Des voix individuelles s’élèvent dans un stade rempli à son comble. Autant de voix, autant de personnes. La multitude, la foule, le nombre multiplié, c’est une forme désespérée de solitude. Un amoncellement de disponibilités devenu caduque. Imagine un milliard de personnes entrain de dire « je t’aime » en même temps.  

Dans la pierre de nos ventres est déjà inscrite la nuit des temps comme une langue incoercible. Et, les seuls mots qui pourraient éventuellement faire front, sont les mots inventés, le charabia discursif d’onomatopées, la langue morte des siècles qui nous recouvrent. Mais, pour véritablement les écrire, il nous faudrait alors être la mort courtisant la vie. Parce qu’il faudrait puiser à l’outre-tombe la puissance manquante. 

L’inusable réconfort de l’amour se trouve sans doute dans le soupir. Et, je m’acquitte d’être à chaque respiration. Tu es partie aussi vite qu’une flèche va rejoindre l’infini. Mais qu’y faire ? Il faudra bien que je convienne de cette infamie. Les mots ont tari jusqu'à leur propre source. Secs, inutiles, épuisés, ils ne cherchent plus dans leur signification, dans leur symbolisme, la résolution des problèmes. La solution est ailleurs, elle est dans l'action, dans le mouvement, dans l’œuvre de soi. 

L’exil se comporte comme une réaction mutine, comme une incartade jalonnant de plein fouet la roche de la falaise d’où nous avons glissé. Au loin, quelques silhouettes méconnaissables recouvrent le flou du brouillard et, dans la proximité,  les rats rongent l’abîme, les loups montrent les dents, les larmes ouvrent des baies, larges comme des fosses communes où l’on entasse les vies perdues. C’est l’hécatombe des moments cruciaux. Lames d’eau contre la falaise poreuse. Bouillonnement blanc. Faucille d’acier martelé sectionnant le fil de nos épanchements, réduisant la réalité au fait. Plus rien n’a d’odeur, ton parfum est aussi flou qu’une loupe qui traverse le temps écoulé. 

 

 

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Commentaires
B
Cela demeure pour moi l’outil insécable du gommage et de la reformulation de ce qui pèse plus lourd que l’écriture elle-même. J’y vois se dessiner le chemin de l’abandon des charges au profit d’une légèreté propice à l’épanouissement personnel.<br /> <br /> Merci, Michèle de cette annotation.
M
écrire est aussi la flèche qui rejoint l'infini<br /> <br /> bon dimanche B.
LA COLLINE AUX CIGALES
  • Dépotoir et déposoir de mots, de pensées... Ici repose mon inspiration et mon imaginaire ; une sorte de maïeutique effrénée et dubitative et il me plait de pouvoir partager à qui veut bien.
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