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LA COLLINE AUX CIGALES
19 octobre 2012

Nous étions deux, habitant la même vague.

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  Une odeur soyeuse de pâte tiédie, un désir autolâtre sorti de son four, nos besoins de remplissages d’amour, et toutes nos faiblesses étendues là sur la table à manger et à boire. Le monde humain n’était pas encore né que nous n’existions déjà que pour nous combler et nous compenser. Nous avons survécu aux troubles et aux embrouilles du quotidien. A tous ces imbroglios usuels récurrents, absorbants l’attention jusqu’en oublier complètement la musique des cœurs et le déchiffrage des communions fusionnelles. Nous étions nous-mêmes des notes escaladant les gammes. Et, la portée qui nous soutenait, prenait la forme de nos mélodies intérieures entremêlées d’où suintait le lait de nos opéras sauvages et primitifs. La musique primordiale, radicale. La musique où aucun mouvement ne se berce de lui-même. Et, où la poésie est tantôt une épreuve désavouée, tantôt un soulagement berné. Mais toujours un combat de gaieté et de morosité surgissant de nos corps comme un solfège intime du désordre provoqué pas nos sens.

Nous nous sommes enseignés dans la complexité et l’unisson de la rencontre, le récit et la mémoire. Nous avons très vite compris que notre charpente charnelle était limitée aux parois instables de notre monde intérieur. Nous sommes étrécis à cette alcôveinextensible où chanter le temps d’aimer ne tient plus que par l'amour devenu le témoin de lui-même. Nous touchions, alors, d'un doigt pataud et curieux à la véracité des rudiments humains ainsi qu’à l’authenticité de l'autre. Nous étions deux, habitant la même vague, le même roulis. Deux courbes suivant le même trajet jusque dans nos petites solitudes. Deux d’une seule âme, d’un seul esprit. 

Tu sais, il est des actions insoutenables dans l’écriture. Des paroles comme des maux de gorge, des glaires de vocabulaire amassées et coincées dans la chair, des extinctions de voix soudaines, des mots qui se perdent ou se déchirent dans les voiles de nos bouches. Nous nous dissipons dans l’air comme de la toux accompagnée d’un déchirement, d’exultations vives, inflammatoires, avec une sensation de brûlure décapant la langue de son four trop gras. Ecrire n’achève pas de se défaire de cette fièvre accablante. La voix est alors un crayon défectueux, une mine noire inscrivant des mots entremêlés dans les pâtés d’une encre bleu foncé ; un bleu froncé dans un ciel sans marge. D’une pâte durcissant la salive qui opère dans les membranes de la chair une multitude d’incisions fines. Et tout ce qui remonte au jour ne tient qu’en des grumeaux de farine compactée. Des amas de dire incompréhensibles. Des chants bruyants et saccadés. Des mélodies sans instruments, sans cor pour chanter l’Oratorio du monde qui à l’intérieur de soi danse mille valses tournoyantes.

 

 

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