La vague. (4)
Le temps nous tient dans sa main. Toujours cette vitre où se collent nos visages. Le souvenir sort de sa soif et désaltère la pensée immédiate. Je ne sais plus si c’est l’angoisse qui affronte la réalité ou bien si c’est l’air qui s’étouffe. J’ai perdu l’image du fossile qui loge mes fondations. Des cordes de lumière sont entrelacées sur mes genoux. Il fait nuit sous la glace.
Aujourd’hui encore lorsque je ne te sens pas triomphante dans mon esprit, ma voix frémit et je te cherche du bout des lèvres dans le balbutiement des heures défuntes.
Chaque jour s’écope des heures de vidange vécues dans la dégringolade du temps. Je sais aujourd’hui toutes ces remontées chargées du ruissellement d’empreintes. Elles viennent encombrer de leurs images désolées, le soir qui prépare la nuit. C’est un crissement désemparé qui recouvre peu à peu la lumière fuyante des aires nostalgiques. Ce lieu d’aliénations où toutes les matières me sont mystérieuses. Habitué à lire ce qui est, bien plus qu’à m’approprier ce que chaque chose signifie. Je m’endigue comme une citadelle craintive de la crue. Des algues sous la peau cherchent un peu de lumière. Les interrogations compulsives ne trouvent pas de réponse: qui suis-je, où vais-je ?
La peur de souffrir davantage liquéfie toute certitude. Je suis contraint à la déconnection si je souhaite préserver l’immensité du jour qui s’enfuit dans l’ombre. L’anémie du regard dessine une bévue. Tes mains fouillent ma langue, mon corps, mon sang.
Et puis, des fruits frais. Du mou pour les arbres et les feuilles. Ce n’est que du temps. Temps de vacances terminées, temps alphabétique. Girouette sur la tête et le vent qui passe. Et puis, la criée du matin blottie dans l’échappée du ciel. Et puis, le revirement, le revivre et le sceau d’un tampon sans encre. Demain.