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LA COLLINE AUX CIGALES
25 mai 2011

Le monde se refait dans nos yeux.

nue_bleu_feminin_a3b521T400Il faudrait pouvoir se servir de la joie comme d’un métronome donnant la cadence régulière au moindre soupir. Il faudrait se ravir d’un tesson d’amour, d’un verre fendu, d’un bouche-à-bouche avec nos miroirs. L’amour nous fait et nous défait… Il s’inscrit en trouble fait sur le regard que nous lui portons. Il se grave à l’eau qui s’échappe de nos corps. Il se gargarise de sa propre jouissance. Il se pavane d’excès dans la doublure fragile des ressemblances.   

 

Le cru de nos chairs aère le monde d’une vraisemblance qui a le goût de ma réalité. Peut-être faut-il s’oublier dans la profondeur de la solitude pour ensuite reconnaître l’humanité qui nous secoue d’un seul regard ?

 

Toute rencontre ravive les bleus de l’âme. A se savoir tétaniser au milieu de la multitude sans que rien ne m’érige par-dessus, soustrait à moi-même, j’avance dans la parole comme un scaphandrier au fond de la vase. Ton apparence déjoue la luminosité, et ton visage m’apparaît distinctement. Plus il fait noir, plus la clarté devient une boue offrant une bonne lecture des formes.

 

Il fait définitivement nuit dans le jour. Nous sommes des petits Poucet parsemant nos chemins d'existence de cailloux blancs. Mais, tout disparaît et tout s’efface. Il ne reste que soi et ce qui est perdu. Il y a quelque chose de superflu dans l’utile. Ta vie a servi ta mort jusqu’à venir briller comme une lame éclairée par le soleil s’illumine à devenir éblouissante. Et te voir encore c’est perdre la vue.  

 

Aveugle comme Œdipe, les mains sur la poitrine des heures lourdes, mais les mains tendues vers toi. Tu le sais, je n’ai pas de lieu à vivre où la providence serait une carte retraçant le chemin qui me ramènerait à mes racines. Mon chemin se fragmente et se dissout là où tu n’es pas. Tes cendres sont tout ce qui reste pour poser les pieds. Ma route est peuplée d’hésitations, de maladresses et d’inquiétudes. Mais, je vais vers toi. Je suis en route bien avant que tu le saches. 

 

Le monde se refait dans nos yeux. Notre histoire regagne sa maison. Chaque histoire a un lieu qui lui est propre. Et comme si tout retrouvait sa place, elle revient baigner à sa source. Nous sautons à travers le temps. Une toile rayée d’ombres s’est déchirée. Bien sûr, il reste d’innombrables promenades, mais nous avons précipité la nostalgie sous l’avalanche de des dégels circonstanciels. La vie a fleuri par deçà. Plus aucune ombre ne trébuche dans notre jardin. Et puis, nous avons appris à nous blottir dans la marge. A l’écart des ciels d’hiver qui encombrent les histoires d’amour défuntes. Tous les soleils ne fondent plus la matière inanimée. Nous logeons une saison transversale. Quelques hématomes démangent encore un peu nos peaux d’enfant, mais la pelure a dissout la couche de croûte qui nous tenait enfermé en nous-mêmes. Le présent est devenu un temps immobile. Le futur ouvre sa porte mais il se ne peut transporter avec lui que cette urne invisible du souvenir tel que je le fais exister.

 

Je suis né en fin d’été, à la saison où la nature quitte sa peau bronzée pour se dévêtir des rêves qui berçaient l’illusoire plénitude de l’éternité chaleureuse. Je suis né de la rencontre du ciel et de la terre, dans un paysage où tout se prépare à la fixité de l’hiver rigoureux. Une simple circonstance organisée du hasard. Une incartade excentrique, une dérive de la vie qui s’introduit dans la nuit, s’immisce dans les ténèbres pour y accoucher de son lait blanc. J’ai longtemps flotté sur des eaux usées avant de concevoir l’énigme comme une délivrance providentielle. J’ai du alors croire que la lumière était un geste. Un geste salvateur. Une réminiscence lavée par la foudre. J’ai du croire que la clarté était droite comme un piquet, croire que sa verticalité rigoureuse n’éclairait que le dessus de la tête. Mais, le corps, cet entêté à vivre, m’a bien vite informé de ses besoins et de ses exigences. Tout s’est très vite organisé pour la survie. Etre léger était plus qu’un espoir fondu dans la masse. Et puis, il a fallu se relever, il faut toujours se relever. Debout la sensation de lourdeur est encore plus massacrante. Et si, je cherche encore à toucher les étoiles de mes lèvres, c’est bien parce que je supporte difficilement cet atterrement obligatoire.        

 

Toi, bien sûr, tu es venue au monde à la fin de l’hiver, à l’heure où tout se prépare à foisonner. A l’heure où les futurs bourgeons se contractent dans la sève nourricière. A l’heure où la nuit s’éteint pour donner lieu à la pétarade de lumière et de couleurs. A l’heure où l’attente est une promesse.

 

Tu vois, nous ne pouvons nous affranchir des saisons. Chacune d’elle a ses secrets et ses mystères. Nos yeux sont des étamines que le vent transporte. Ils fécondent dans le souffle de l’évidence silencieuse. Nous ne pouvons voir le miracle qui s’organise à l’intérieur. Nos yeux sont aveugles à la bonté du monde et nous nous culbutons à chaque joie qui nous vient.

 

Il nous faut consentir au tremblement si nous espérons atteindre la solidité du rocher qui nous attend sur la berge. Nous sommes fragiles de nos cœurs battants. Vulnérables.

 

L’émotion qui se murmure dans le lit de nos rencontres est une attente dénudée.  

 

A un certain moment on sait que l’on est une particule de la joie du monde. A un autre, on sait qu’il nous faut rassembler toute l’énergie qui est en soi pour nous maintenir dans la main de l’autre. Il n’y a pas d’offrande, il n’y a pas de don, autres que nous-mêmes, nous qui venons du gouffre où la lumière naît du désespoir de la nuit.

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Commentaires
S
Avec nos mots, nous touchons les étoiles..et Cassiopee serpente dans les collines de la nuit pour rencontrer tous nos hasards.
R
Tout meurt afin que tout vive.Tout vit afin que<br /> tout meure.Nous sommes tour à tour étoile puis poussière d'étoile filant féconder la voie lactée.<br /> Qui sait si Cassiopée rencontrera Andromède ou<br /> Persée? Qui sait si nous serons ou non aptes au bonheur? <br /> J'aime tes textes car ils nous emmènent tour à tour et parfois en même temps au bout des<br /> galaxies ou sur le divan stellaire de la couche<br /> d'Amour.<br /> Amitiés.
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  • Dépotoir et déposoir de mots, de pensées... Ici repose mon inspiration et mon imaginaire ; une sorte de maïeutique effrénée et dubitative et il me plait de pouvoir partager à qui veut bien.
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