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LA COLLINE AUX CIGALES
24 novembre 2009

E - 012 - Alinéa.

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Dans l’arbitraire de l’alinéa, dans le décousu de formes pyramidales se fatigue la langue. A sa pointe, la parole s’ennuie et le temps s’étire jusqu’au bout des horizons. Seul le brouillard chuchote dans le touffu des dissonances. Le mot se perd et avec lui, l’illusion aussi. Concordances précaires des registres des voix, l’amour se meut et se tortille comme un ver de terre sorti de sa cache. L’alinéa s’aligne sans se conjuguer. Saillant, il aurait pu dire ou évoquer.

L’absence s’arpente comme une nuit de crissement de pierre, d'un élan inébranlable. D’un élan pesé dans la légèreté des grâces versatiles qui concourent au paroxysme des choses et des êtres. Cette solitude peuplée de déréliction occupe toute la lagune. Sur la langue, les orties ne griffent même pas. Le lissé augmente la perte, provoque la glissade et amplifie la sensation immesurable du vide où l’on s’échoue. L’absence n’a pour mission que de maintenir présente en nous une toute petite flamme, une minuscule lueur que l'on aperçoit quelquefois sous les paupières de nos mémoires instinctives, derrière les vitres sales de nos maisons abandonnées où l’oubli en retrait croise nos visages d'aveugles.

Il faut aller à la ligne. Les mots comme les pas s’avancent. Ils augurent l’inconnu, inaugurent l’impalpable et franchissent les barrières virtuelles de nos déterminations à marcher avec la langue comme marchent les bergers durant la transhumance.

Il faut aller à la ligne suivante. Ouvrir la ligne. Ouvrir le vivant comme on partage un fruit mûr pour en retirer le noyau.

S’oublier soi pour laisser naître toute cette survivance qui nous remplit et nous déborde sans que nous puissions la saisir. Dans l’abstraction, le feu redevient le feu, le vent redevient le souffle, le cœur reprend la forme de son humilité à recevoir et à donner. Et la vie crépite de toutes ses buches oubliées. Et la vie continue à nous surprendre, à nous emmener avec elle partout où nous avions cru à la dérobade.

Léger, le fourmillement qui tantôt agaçait nos membres endoloris disparaît et avec cette inertie redevenue flamboyante le vide devient aussi léger que la plume d’ange qui virevoltait dans notre enfance et que nous suivions des yeux le temps qu’elle se redépose en attendant un autre souffle.

L’alinéa est ce saut à pieds joints qui nous distingue du chaos. Ce repli conjurant le sort pour lui signifier le non renoncement. L’écart fragile où se déploie notre être. Juste pour être. Ce fin intervalle dans lequel je me confie au monde.

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  • Dépotoir et déposoir de mots, de pensées... Ici repose mon inspiration et mon imaginaire ; une sorte de maïeutique effrénée et dubitative et il me plait de pouvoir partager à qui veut bien.
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