→ 122 – Loin des temps conçus.
Hémorragie de brouillard dans les ouates du silence, l’acuité chiffonnée, le pur de l’instinct remplit de l’encre de nos fuites, le vide comme seul désert habitable.
Un autre temps, un autre jour, pour immoler les fadaises et enterrer les futilités. Un autre jour semblable et différent, complice aux questions sans réponse, au vivre sans mémoire, aux gestes autres que des gestes. Un jour de toutes choses et d’émotions déracinées aux fleurs de nos jardins vierges. Un jour sans nuit et sans lumière, juste fait de nos couleurs et de nos perceptions neuves.
Jouir du spectacle du monde, sentir tout et de toutes les façons et puisque l’étendue se limite à nos yeux, les fermer et descendre sous les paupières rejoindre ce qui feint l’existence pour sentir autre chose que nos pensées.
Tout échappe, la non-maitrise des sens est notre coffre fort à miracles, là où une intelligence naturelle nettoie les mensonges d’émotions prisonnières de s’être socialisées, de s’être rendues coupables de sentir en pensant.
Tes yeux calmes comme un lac d’altitude abritent une part tissée de l’eau, une ondulation douce du spectre de vie et de lumière, la dérive des heures pensées, un clapotis des rêves où fusionnent le consenti dans un silence chargé des puretés de l’air pour que battent les ailes de nos papillons qui tournent autour du cadran de nos pendules et dansent sans toucher les aiguilles.
Chasser l’illusion comme on chasse la buée sur des lunettes, virer le réel omniprésent et s’inventer aux bribes de nos souffles, créer le jour et le monde dans l’écho tonitruant des désirs qui poussent dans l’enfance, loin des peurs qui crient nos déchéances d’amour dans des ciels d’univers que rien ne peut maculer et altérer.
Ta peau où s’inscrit le rêve fou de se dénuder à la chair vive, tes lèvres où la lune éclabousse la parole simple aussi simple que le cri d’un oiseau dans le ciel, tes mains où s’agrippe le singulier du légitime et puis tout toi devenue l’impression de l’impression et le partage d’une fusion innommable, une confusion éthérée de l’idée que l’on se fait de soi.
En dehors de la vie pratique, dans la mort ressuscitée de l’irréfléchi. En dehors des vies qu’on peut toucher. A l’intérieur du baiser d’une sirène réincarnée.